Vous vous êtes déjà retrouvé dans un endroit que vous ne comprenez pas ? Ce genre d’endroit où chaque parcelle, chaque centimètre ne vous dit rien, ne semble pas en ordre ? Bah c’est mon cas lorsque je pose un pied dans une boutique de vêtements. J’ai l’impression d’être la seule qui s’intéresse au mariage des couleurs et des formes, des tissus. Pour le coup, j’en connais deux qui seraient d’accord avec moi.
Je suis donc devant cette boutique, cette vitrine que je ne comprends pas. Les couleurs ne sont pas ordonnés, les tissus sont mélangés sans distinction, les formes ne sont ni coordonnées ni jolies à voir. Est-ce que le ou les responsable(s) de ce magasin en a/ont quelque chose à faire ? Je ne suis pas là depuis longtemps. Mon truc, c’est de créer nous sommes d’accord. Mais si mes créations finissent dans ce genre d’endroit… On va vite avoir un
GROS soucis.
Non mais soyons d’accord tout de suite. Je ne passe pas des heures à réfléchir, des jours à dessiner, des semaines voir des mois à concevoir pour que des idiots vendent mes œuvres ainsi. Sinon… Je jure que ça va gueuler. C’est dommage. Ils ont de belles choses. Mais ils ne savent
ABSOLUMENT pas les mettre en valeur. Mais vraiment. Tch. Débutants.
Je finis par y entrer. Je veux voir le carnage jusqu’au bout. Comme je le pressentais, les vêtements sont désordonnés et nullement mis en valeur. Je trouve ce spectacle désolant, déprimant… Aussi bien pour les clients, pour les vêtements, les créateurs… Mais aussi pour le magasin et son chiffre d’affaire. Alors, malgré la cliente présente – ayant un attrait visible pour les couleurs mer et ciel – je demande à voir le responsable. Après une insistance que je n’ai que rarement eu, il daigne enfin me rencontrer.
Bonjour Mademoiselle, vous avez un soucis ?
C’est pas réellement un soucis. Mais j’aimerais savoir quelque chose. Vous avez quelqu’un qui s’occupe de la disposition de vos produits ?
Oui, c’est moi-même.
Ah. Bien. Alors, venez avec moi.
Je l’emmène dans tous ses rayons, un à un, parlant bien plus que de raison, lui expliquant - sans écouter ses médiocres justifications - en quoi son magasin perd environ cinquante pour cent de son chiffre potentiel d’affaire. Enfin, finissant de nouveau près de l’accueil, je me permets de me présenter.
Excusez-moi. Je m’appelle Willow SKIMOH. Je suis créatrice. Et cela m’ennuierait que votre boutique – qui a pourtant un excellent potentiel – n’affiche mes vêtements ainsi. Je venais pour une potentielle négociation.
Comme toujours, j’ai sur moi mon calepin d’idées et de patrons plus ou moins travaillé. Je le lui laisse, observant la cliente qui repose un haut pour en prendre un autre.
Non… Prend pas celui-ci…
Je me déplace, attrapant t-shirt et jean, robes, observant par moment la demoiselle avant d’arriver vers elle. Je permets beaucoup de choses ici… C’est assez surprenant. Bah. J’ai retrouvé Hayden. Je peux me le permettre. Et puis je vais reprendre mon calepin et je ne les verrais plus. Ni le vendeur, ni la cliente. Alors bon…
Excusez-moi. Si je puis me permettre, ces ensembles vous mettront bien plus en valeur. Ça ne vaudra pas quelques-unes de mes créations. Mais si je peux vous conseiller, ce serait avec plaisir.
Ce n’est ni mon rôle. Ni mon boulot. Je perds mon temps à faire ça… Et quelque part… J’ai envie de l’habiller. Elle a un beau visage, un bon maintien, une bonne silhouette… Je pourrais lui faire une robe… Je peux déjà la visualiser…
J’ai un soucis de créateur… Je devrais arrêter de voir chaque être humain comme un mannequin qui s’ignore…