Moi je ne suis qu'une fille de l'ombre, qui voit briller l'étoile du soir [Shu et Jane]

Visiblement elle faisait partie de ces personnes qui ne sont pas du matin. Elle était mal lunée et prit mon manteau brutalement tout en lâchant un "merci" comme s'il lui arrachait les cordes vocales sur toute la longueur. Je crois que mon choix de ne pas blaguer fut un choix judicieux, j'en aurais sûrement pris plein ma tête si je l'avais cherchée. Elle allait peut être essayer de me semer aussi, la vigilance serait de mise ce matin. Elle ne manqua pas de sortir en trombe du placard. Je laissai l'intérieur tel quel pour ne pas la perdre de vue. Elle allait vite, j'avais du mal à me tenir à sa hauteur malgré mes grandes jambes et tout l'entrain que je pouvais y mettre. Fort heureusement, notre étage était encore relativement vide. Malheureusement il ne l'était que relativement, au détour d'un croisement on tombait sur un agent de sécurité. Maggie se tourna vers moi, je lui fis signe de se tenir tranquille, mais au moment où l'homme ouvrit la bouche elle s'élança avec l'agilité et la rapidité d'un félin bondissant sur sa proie.

Elle le mit hors d'état de nuire en un battement de cil et planqua l'inconscient dans un placard. C'est fou le nombre de placard qu'il y a dans cet immeuble n'empêche... Je me doutais qu'elle voulait changer de tenue, je me suis donc chargé de monter la garde, de faire en sorte qu'elle ne soit pas dérangée. Une fois sortie et habillée, elle me rendit mon imper'. Soit, après tout j'aime beaucoup ce manteau et je n'ai pas spécialement les moyens de m'en payer un toutes les deux semaines non plus.

lorsqu'elle ouvrit la bouche pour la première fois depuis son réveil, elle me permit d'identifier la cause exacte de son humeur maussade. Il est vrai qu'un peu de caféine ne serait pas de refus pour être pleinement alerte. Cependant avons-nous réellement le temps de nous arrêter prendre un kawa avec la pègre potentiellement à nos trousses ? Pourquoi pas, nous arrêter quelques minutes me permettrait de scanner les gens autour et de vérifier qu'il n'y ait personne se comportant de façon suspicieuse. Nous reprenions notre marche effrénée dans les couloirs en direction d'un ascenseur ou d'une cage d'escaliers lorsque je pris la parole.

"Si c'est de café dont tu as besoin, on peut s'arrêter quelques petites minutes dans la masse grouillante du matin pour en prendre un, ça me permettra de repérer des comportements suspects en plus. Qu'en dis-tu ?"

Puisqu'elle paraissait impatiente de sortir, je me suis dirigé instinctivement vers les escaliers, je ne pensais pas que poireauter dans quatre mètres carrés allaient la rendre plus aimable, quand bien même elle aurait la perspective de prendre à boire après cela. Alors j'ouvris la porte et la lui tint le temps qu'elle s'engage dans le dédale de marche qui la mènerait à terme à savourer ce met amer mais revitalisant produit à base de grain moulus et d'eau portée à ébullition.

Nous sommes sortis du bâtiment après avoir dévalé les escaliers. J'avais pris soin de scanner de façon intermittente le bâtiment pour chercher des comportements suspects qui auraient pu révéler que l'homme inconscient avait été découvert. Vu que tous semblaient vaquer à des comportements classiques de bureaucrates et autres stagiaires j'en déduis que nous étions encore incognito. Cependant ces vérifications me ralentirent un peu, ce qui parut suffisant pour qu'elle me devance, suffisant pour qu'elle doive m'attendre. Je ne sais pas exactement ce qu'elle pensait, allait-elle réellement m'attendre et se trimballer le fardeau que je pouvais représenter pour elle ? Peu probable à vrai dire. Je revoyais avec quelle vitesse et agilité elle avait allongé le garde. Je suis un bleu, j'ai besoin de m'entrainer sur différents points, pas seulement le maniement de mon don, je venais à peine de le comprendre. Ce sifflet pourrait peut être me servir plus rapidement que prévu. Le monde de l'ombre a des choses à m'apporter, et j'ai avec moi une porte d'entrée facile d'accès mais dont le crochetage va s'avérer compliqué et je ne bénéficierai d'une seule et unique chance.

On finit par déboucher sur la rue bondée. Je continuais d'observer sa façon de faire, elle prenait soin de dissimuler son visage de la caméra et sortit une cigarette. Du tabac ? Une surprise, je pensais que ce genre de personne prenait soin de son corps, étant son outil de travail elle ne peut pas se permettre de s'empoisonner et de diminuer ses capacités me semblait-il. Et à vrai dire il semblerait que je ne me sois pas tromper sur ce point, en effet elle jeta et écrasa cette drogue légale une fois plus ou moins hors du champs de vision de la caméra. Elle prit ma main, alors elle voulait me trimballer avec elle ? Je l'avais peut être mal jugé il semblerait. On entreprit de traverser la marée humaine mais nous nous faisions constamment bousculé, un classique dans ce genre de rue où les piétons sont rois. Et puis ma main perdit la sienne, le temps d'une bousculade de plus et elle s'était évanoui de ma vue. Petite maligne, je vais te laisser filer cette fois-ci, mais attends-toi à me revoir rapidement.

Pour ne pas paraître suspect, et parce qu'on pouvait me suivre, je poursuivis ma marche. Après tout je dépassais une grande partie des passants de plusieurs centimètres, si quelqu'un voulait me prendre en chasse il n'aurait aucun mal, même au milieu de ce rassemblement de brebis. Je scannais la zone à la recherche de chasseurs et d'une demoiselle preste et agile. Ses pas feutrés et presque imperceptibles avaient été un calvaire à repérer parmi tous ces piétinements, néanmoins je la vis s'échapper par ma droite, plus bas dans la rue que je remontais. Pour ce qui est de poursuivant, difficile à dire, le nombre de moutons allant dans le même sens que moi était trop important pour repérer des loups qui s'y cacheraient. Tant pis, je vais conserver mon idée de café, et tant pis pour elle si elle ne veut pas m'accompagner.