rira bien qui brûlera le dernier [Shushu et Ingrid]

C'est qu'elle avait de plus en plus de répondant en plus, même si ça tournait surtout autour du fait qu'elle veuille me brûler vif. En tout cas il semble que je l'ai vraiment poussée à bout, elle semble hors d'elle. En même temps elle vient littéralement de s'embraser, ce qui lui donne un certain charisme et la rend tout de suite beaucoup plus impressionnante à vrai dire. Elle doit certainement mieux maîtriser son pouvoir que moi. Mais je garde l'avantage physique et celui de l'expérience. Elle ne voulait plus du tout rire et il allait falloir lui expliquer deux trois trucs. Le plus dur allait être de faire en sorte qu'elle m'écoute. Pour se faire, je me redresse et soulève avec moi quelques morceaux de roche que je fais tournoyer autour de moi. C'est certes moins impressionnant mais ça pourrait m'offrir une protection satisfaisante si elle venait à attaquer. Il était peut-être temps d'entendre ce qu'elle a à dire.

"Si c'est une passe d'arme que tu veux je te l'offre, il ne faut pas que je me rouille si je veux accomplir ce que je me suis fixé."

J'étais désormais aussi sérieux que possible, je devais lui montrer que je la respecte comme mon égale, c'est ce qu'elle semble vouloir et c'est ce que je ressens de mon côté. Je suis sûr que derrière cette carapace il y a juste une petite fille blessée qui a besoin de se défouler, et je vais lui donner ce qu'elle veut. Bon après je pourrais très bien me planter, étant donné le peu de conversation auquel j'ai eu droit je n'ai pas assez de matière pour être sûr de ce que j'avance. Mais le petit combat qui se profile va m'aider je pense.

"Amène-toi, montre moi ce que tu sais faire un peu, je suis curieux maintenant. Je veux me battre avec toi comme ton égal, ni plus, ni moins."

On verra si cette dernière provocation aura un effet et si oui lequel, j'ai vraiment envie d'en apprendre plus maintenant. Surtout que je sens que ça peut vite devenir intéressant, aussi bien du point de vue du combat, que de la psychologie de la gamine, je me demande où tout cela va ma mener.

Je ne pouvais m'empêcher de sourire, cela faisait longtemps que je ne m'étais pas amusé comme ça. Cette jeune fille avait non seulement du répondant verbal mais aussi physique, c'était presque beau à voir. Sa puissance était indéniable et ma défense avait du mal à tenir, et quelques flammes parvenaient à passer au travers de mon bouclier. Je n'osais pas répliquer, je ne voulais pas lui faire de mal. Mais en même temps ce serait manquer à ma parole de ne pas lui répondre comme elle le mérite. Bien évidemment elle n'avait pas manqué de me vanner sur mon vocabulaire vieillissant.

"Je parles comme je veux, cela fait partie de ma liberté, tout comme toi tu parles bien vulgairement pour une jeune fille, mais c'est ton droit le plus légitime"

Elle avait créé un joyeux foutoir, embrasant les poubelles autour d'elle. Peut-être les éteindrai-je après notre petit combat. Mais plus important, je réussi à la faire ricaner, ce n'était pas encore un éclat de rire franc et joyeux mais j'étais sur la bonne voie. Néanmoins elle ne lâchait pas prise, et ses attaques ne perdaient ni en rythme ni en intensité. Je ne faisais pas attention aux dommages que j'encaissais, je me concentrais sur le plaisir de combattre quelqu'un avec une telle fougue, sans mes quelques bases j'aurais été brûlé vif instantanément. Au fur et à mesure des assauts, sa cape de feu s'affaiblissait, tout comme les coups que je prenais, elle se fatiguait rapidement. C'était compréhensible vu sa carrure mais elle demeurait impressionnante. Au moment où j'allais baisser ma garde, elle hurla, elle ne voulait pas que je sois son égal, toute sa haine lui redonna de la vigueur. C'était maintenant ou jamais, je devais contre-attaquer.

"On verra ça !"

Je venais de hurler à mon tour, le voisinage devait être fou vu le vacarme que l'on créait. Mais je m'en fichais, tout ce que je voulais c'était la remercier pour cet affrontement spectaculaire. Alors au même moment où elle envoya la plus puissante des charges auxquelles j'avais eu droit jusqu'à maintenant, je décidai de sacrifier la protection sur mon bras gauche pour frapper à travers les gerbes et le manteau de la fillette. Certains diront que je suis fou, ce à quoi je répondrai que oui, je le suis et ça paye en général. Je fus soufflé au même moment que mon coup toucha sa cible. Je pu me rattraper en levant le bitume pour me stopper. Je vis que ma manche avait brûlé, révélant de vieux stigmates d'une adolescence regrettable. Laissez-moi vous expliquer, il se trouve sur mon avant bras les cicatrices d'un scarification. Ces cicatrices forment lorsque l'on y regarde de plus près les mots "NO FUTUR". Le feu de déchets éclairait suffisamment bien la zone pour que je puisse lire les inscriptions et me rappeler cette époque.

Je l'avais à peine vu bouger, trop occupé à regarder quelque chose que j'avais presque oublié et qui était pourtant là, littéralement gravé en moi. Elle m'a juste balancé une phrase à la va vite qui m'a à moitié ramené sur Terre, qu'est-ce qu'elle raconte avec son histoire de tigre ? Encore une chose dont j'allais devoir discuter avec elle. Le problème c'est ce qu'elle a dit ensuite, comment en est-elle arrivée au point de n'avoir aucun remord à tuer ? Et le pire est qu'elle agissait réellement comme si elle voulait me tuer. Elle bondit pour me planter quelque chose dans la cuisse. Je n'ai pas pu réagir assez vite et la douleur m'assaillit. Heureusement que j'avais connu quelques bagarres d'ivrognes dans des bars malfamés. J'avais déjà connu pire mais j'allais devoir nettoyé tout ça. Dans le doute, je retirai l'arme improvisée de ma jambe et la mettait dans ma poche. La chute du crayon dans celle-ci coïncida avec la chute de sa propriétaire. Elle avait certainement poussé son corps à bout. Je m'approchai pour voir si elle était encore consciente.

Je devrais peut-être la ramener chez moi, même si elle a voulu me tuer, je lui en devais une. Je me penchai donc au dessus d'elle, elle semblait encore parmi nous mais était clairement dans un état lamentable. Je ne savais pas trop quoi faire, j'étais persuadé qu'elle n'était pas calmée mais étrangement j'avais envie d'en savoir plus sur elle. Peut être qu'avec une approche plus diplomatique cela fonctionnerait mieux.

"Écoute, j'aimerais sincèrement en apprendre en plus sur toi, tout ce que je veux c'est discuter avec toi, d'humain à humain, je ne sais pas quoi faire pour que tu m'écoutes."

Tout en lui parlant j'avais sortit le crayon que j'avais en poche et ramassé ceux qu'elle tenait pour les remettre dans son sac. J'attendais ensuite assis à côté d'elle, faisant pression sur ma plaie, je ne voulais pas me vider de mon sang en pleine rue sous les yeux de cette sale gosse. Je me demandais sincèrement quelle serait sa réaction, cette gamine avait le don de m'intriguer et d'attiser ma curiosité. N'empêche, j'avais l'air fin à m'être retrouvé dans cet état à cause d'une simple petite fille un peu énergique et colérique, pas très crédible le destructeur de l'humanité à s'occuper des fugueuses comme ça.

Décidément, elle ne voulait pas coopérer et ne semblait vraiment décidée à m'écouter. Pourtant, je ne pouvais pas juste la laisser là et m'en aller, je devais trouver un point faible, quelque chose pour percer, ne serait-ce qu'un tout petit peu cette carapace qu'elle s'était constituée. Elle se mit dos à moi, elle voulait certainement se reposer après l'effort fourni. Elle continua de me menacer et d'être désagréable et vulgaire. Mais je pouvais très bien être têtu moi aussi. Je sentais qu'elle et moi partagions quelque chose dans notre vision du monde ou peut-être dans notre passé. Néanmoins, et malgré son manque d'amabilité, je ne pouvais juste pas la laisser comme ça dans la rue. D'un autre côté si moi je restais avec elle je risquais bien d'y passer, et ce serait lui faire bien trop plaisir. Je continuais de réfléchir quand elle me mit une dernière fois en garde. Elle n'aimait vraiment pas ma compagnie décidément. Une idée me vint alors à l'esprit, visiblement et étant une fugueuse, elle fuyait quelqu'un.

"Je suppose que tu ne veux pas que l'on te retrouve non, vu que tu as fugué. Alors je te propose quelque chose. Puisque je veux te remercier pour ce magnifique combat que tu m'as offert, je t'offre la possibilté de venir à mon appart' le temps que tu récupères. Une fois que tu iras mieux je te laisserai libre de faire ce que bon te semble. Et en plus tu seras bien cachée là-bas, ça te va ?"

C'était la dernière idée que j'avais, si elle m'envoyait encore bouler je ne voyais pas d'autre chose à faire que de la laisser, pourtant je ne lui voulais aucun mal. Et alors que je pensais ça, mon cerveau emprunta des chemins tortueux à travers ma mémoire pour me faire comprendre qu'il y a quelques années j'aurais certainement agi de la même façon face à quelqu'un d'un peu trop collant. Qui plus est, je ne m'y étais sûrement pas pris comme un chef et j'avais bien foiré la première impression. Mais tout cela ne rendait le défi qu'elle représentait toujours plus intéressant. Ainsi, j'attendais avec impatience sa réponse, même si j'étais aussi persuadé que cette dernière allait être négative.

Elle semblaut vouloir me dissuader de l'aider en se servant de types "puissants". Mais qu'elle parle de mecs au bras long ou de bien de ceux ayant un don plus maîtrisé et plus dévastateur je ne les craignais pas. Pour les premiers ils étaient ceux qui ont dégradé la société et la planète donc s'ils vennaient me chercher des ennuis je leur aurais mis mon point en travers de la face. Pour les autres, un bon défi ne m'effrayait pas plus.

"Je n'ai pas peur des puissants, qu'il vienne ton père, je lui expliquerai ma façon de penser."

J'étais certain qu'elle n'allait pas être impressionée, mais je le pensais sincèrement, il pouvait bien être le mec le plus puissant de la planète que ça ne m'empêcherait pas de dire la même chose. Néanmoins elle était déjà passé à autre chose, me demandant comment j'étais devenu un tigre. Encore ce terme, je me demandais ce qu'elle entendait par là. Je ne ressemblais pas spécialement au félin et mon don n'avait rien à voir non plus avec cet animal. Je n'étais pas particulièrement poilu ni rayé. Quoi que, en y repensant, la première fois qu'elle m'appela comme ça c'était lorsque ma manche avait brûlé et après le coup que je lui avait porté. Soit elle parlait de ma force mais la réponse à sa question était donc évidente, soit elle parlait de mes cicatrices. Je partis du principe que c'était bien de mes blessures dont il était question dans son esprit.

"Je suppose que tu parles de mon avant bras. Pour faire simple, quand j'étais adolescent j'étais un peu trop rebel et hors des clous pour mes parents. Et ça je l'acceptais très mal. Du coup je les provoquais constamment, juste parce que cela les rendais dingues. Alors un jour je me suis dis que je me ferais bien tatouer quelque chose, cela les mettraient vraiment hors d'eux. Mais j'étais mineur et tous les tatoueurs que je suis allé voir n'ont pas voulu répondre à ma demande. Au fond de moi j'enrageais de ne pas pouvoir faire ce que je voulais. Oui j'ai depuis un certain temps un grand besoin de liberté et j'estime que je sais ce qui est bon pour moi donc je fais ce que je veux. Bref, tout ça pour dire que j'ai eu la grande idée de faire quelque chose de pire qu'un simple dessin, je me suis gravé l'un de mes slogans préférés de l'époque. C'est ainsi qu'avec un couteau, un briquet et un truc dans lequel mordre je me suis gravé ses mots en moi. Et depuis ce jour, non seulement mes parents ne m'adressait plus la parole, mais en plus je ressens encore cette sensation de brûlure mélée de déchirure chaque nuit quand je ferme les yeux. Voilà, tu sais grossièrement comment je suis devenu un tigre."

En y repensant, j'étais certainement un peu comme elle à cette époque. Je rejetais tout ceux qui n'étaient pas comme moi, je pouvais être violent aussi parfois. Je regrette certaines choses de cette époque, mais cela m'a permit de devenir ce que j'étais ce soir là donc je ne pouvais pas tout regretter non plus. Ce qui me venait ensuite à mon esprit c'était le fait qu'elle ait donné ce nom aux gens comme moi. Elle devait sûrement connaître quelqu'un qui s'était scarifié aussi. Je doutais que ce soit pour des raisons similaires, il devais sûrement s'agir d'une tentative de suicide. J'en venais à la plaindre, connaître ce genre de choses à son âge, elle était vraiment pas aidée. Mais je ne devais pas lui montrer, j'étais sûr qu'elle se vexerait ou se renfermerait encore plus. Une vive douleur me tira cependant de mes pensées, ma cuisse saignait toujours et je devais au moins me faire un garrot. Foutu pour foutu, j'arrachai donc la moitié de ma manche toujours intacte pour me faire un bandage sommaire. Il ne me restait plus qu'à attendre sa réaction, voir ce qu'elle allait penser de mon histoire.

Madame le tigre ? Alors elle connaissait effectivement quelqu'un d'autre comme moi, ou quelqu'un avec des stigmates semblables aux miennes. Quoi qu'il en soit je ne semblais pas faire le poids face à cette dame aux yeux de la petite. Sa colère et sa rancœur n'avaient pas disparue et ne semblaient même pas avoir diminuées. Il paraissait évident que si je voulais me familiariser avec elle je devais être patient. J'espérais qu'avec le temps cela allais s'améliorer. J'appréciais son sale caractère et paradoxalement j'étais intéressé par son passé et tout ce qui tournait autour d'elle, ce qui l'avait amené à se comporter ainsi. Mais évidemment la pitié ne servirait à rien, je devais gagner son respect, c'était le seule solution.

Après une dernière menace de sa part, elle s'endormit avec son ours et ses affaires contre elle. Je ne pouvais définitivement pas la ramener chez moi, je ne voulais pas prendre le risque qu'elle y mette le feu à son réveil et j'aimais dormir sur mes deux oreilles, sans redouter que ma vie soit mise en danger. Je ne pouvais donc qu'améliorer un peu ses conditions de repos. J'érigeai d'abord une tente sommaire faite de bitume grâce à mon pouvoir et gravai ensuite quelques mots à l'intérieur, de sorte qu'elle puisse les lire le lendemain matin. Puis je repensai à ce qu'elle m'avait dit, que son père la retrouverait à coup sûr et que c'était un type puissant. J'effaçai donc les inscriptions à l'intérieur de l'abri de fortune pour les inscrire à la place sur un roche que je plaçai délicatement dans son sac. D'un autre côte un troupeau d'éléphants chargeant juste à côté d'elle ne l'aurait pas réveillé vu son état. Le mot disait simplement que lorsqu'elle souhaitait avoir sa revanche, il lui suffisait de graver une heure et un lieu sur le mur derrière les poubelles et que je l'y rejoindrai.

"Bonne nuit petite peste, à la prochaine"

Une fois tout cela fait, je devais rentrer dans mon petit studio pour soigner ma jambe et me reposer, j'avais aussi dépenser beaucoup d'énergie et cette sale gosse était clairement un adversaire à ne pas prendre à la légère. Elle maîtrisait son don mieux que moi et n'avait perdu que parce qu'elle avait brûlé ses réserves sans réfléchir, avec un peu d'entraînement elle serait réellement très dangereuse. J'allais devoir reprendre sérieusement mon entraînement. De plus le combat de ce soir-là m'avait donné une idée, une idée pour améliorer la capacité offensive et défensive de mes capacités. Je devais apprendre à mieux façonner mon élément pour cela. Ainsi, j'emportai avec moi un bloc de roche dont j'essayais de changer la forme tout au long du chemin qui me ramenait chez moi, essayant de le transformer en une sphère parfaite.