Mais... C'est un crime ! (Elina/Airisu)

Une journée comme tant d’autres au lycée Danshi. Du moins, était-ce qu’elle avait cru en arrivant ce matin-là… Comme d’habitude, Elina était arrivée en bus un peu avant la sonnerie indiquant le début des cours. Comme d’habitude, Asami était venue la voir, avant que les cours, comme d’habitude barbants, ne commencent. Et après une pause midi passée en compagnie de sa fidèle acolyte, elle et les autres filles de la classe devaient se rendre à la piscine pour passer quelques heures à pratiquer les diverses nages qu’elles devaient pratiquer. Et comme d’habitude, quelques garçons avaient essayé de venir se rincer l’œil en épiant toutes ces jeunes filles dans leurs maillots moulants, jusqu’à ce que leur prof de gym ne vienne les attraper par le col de leur t-shirt pour les ramener à leur propre cours tout en leur assénant un sermon bien salé. Jusque-là, il n’y avait rien eu d’anormal, une douce et morne monotonie. Mais au retour aux vestiaires, un évènement particulier brisa l’habituelle routine qui avait jusque-là régnée en maître sur cette journée.

Alors qu’elle était en train de terminer d’enfiler son uniforme, une Asami toujours dévêtue vint la voir avec une expression bien embêtée sur le visage. Elle avait beau porter une serviette autour d’elle, la vue n’était pas dénuée d’un certain… intérêt. Certes, Elina n’était pas du genre à reluquer ses camarades de classe lorsqu’elle se changeait, ou même lorsqu’elles se trouvaient dans des tenues plus attrayantes que leur simple uniforme. Mais il lui était difficile de rester de marbre face au spectacle d’une Asami enroulée dans une serviette moulant son corps, ce qui faisait ressortir ses formes avantageuses, avec ses longs cheveux encore humides collés le long de son corps pas tout à fait sec lui non plus. Et comme elle s’adressait directement à elle, difficile de l’ignorer. D’autant plus que la question qu’elle lui posa à voix basse était elle aussi assez gênante :

- Dis, Elina, tu n’aurais pas vu ma… petite culotte ?

Elina eut l’impression que tous les regards s’étaient tournés dans leur direction, alors que sa compagne n’avait pas parlé assez fort que pour se faire entendre. Mais face aux chuchotements nerveux qui emplissaient la pièce, la jeune russe crut un instant que ces derniers n’étaient pas sans rapport avec ce qu’on venait de lui demander :

- Comment veux-tu que j’ai vu ta petite culotte ?!

Elina, elle, n’avait pas suffisamment baissé la voix, si bien que cette fois, les regards des autres jeunes filles dans les vestiaires se tournèrent dans leur direction. Devenue rouge brique, Asami essayait de se faire toute petite, mais sa gêne ne tarda pas à se volatiliser lorsqu’une voix s’éleva un peu plus loin :

- Moi aussi, je ne trouve plus ma petite culotte…

Rapidement, d’autres aveux se firent entendre. Au total, cinq jeunes filles déploraient la disparition de leur sous-vêtement, un bien trop grand nombre pour que cela soit un hasard. Parmi les chuchotements anxieux qui régnaient dans la pièce, un terme se répéta plusieurs fois : Voleur de sous-vêtements. En effet, la conclusion la plus logique tendait vers cette hypothèse. Un pervers s’était introduit dans les vestiaires pendant qu’elles étaient à la piscine, et en avait profité pour dérober quelques-uns de ces précieux attributs vestimentaires. Et voilà que les victimes se trouvaient bien embêtées… L’idée de devoir se balader sans rien en dessous de leur jupe n’était pas pour leur plaire. Stoïque, Elina leur conseille de porter leur minishort de gym afin de remplacer ce qui leur manquait. Face à cette remarque, nombreuses furent celles qui la fixèrent avec incrédulité. Se demandant un instant si elle ne s’était pas trompée dans le choix de ses mots anglais, mais les acclamations ravies qui suivirent lui indiquèrent que ce n’étaient pas le cas. Apparemment, dans leur état de panique, elles  n’avaient pas pensé à cette solution qui, pourtant, lui semblait logique. Mais alors qu’elle pensait que tout était rentré dans l’ordre, Asami lui fit une demande bien singulière :

- Elina, il faut qu’on trouve ce pervers ! On ne peut pas le laisser s’en tirer à si bon compte… Tu pourrais le retrouver ?

Surprise, Elina répondit :

- Hein ?! Pourquoi moi ?!

- Tu es si intelligente, je suis sure que le retrouveras sans difficultés ! Et puis… La culotte qu’il m’a volé, c’est… c’est ma préférée… Et je ne veux pas que quelqu’un d’autre que la voit, à part toi…

En entendant ses dires, les autres victimes hochèrent la tête avec vigueur, l’encourageant à accepter. Si bien qu’elle finit par céder… C’est ainsi qu’elle se mit à arpenter les couloirs au hasard, cherchant un quelconque indice pouvant la mener au responsable de cette affaire. Il ne devait pas être bien loin, ce bougre… Mais sans savoir à quoi il ressemblait, comment diable allait-elle pouvoir l’identifier ? Ce n’est pas comme si c’était écrit sur son front ! Alors qu’elle était prise dans ses pensées, elle ne remarqua pas que quelqu’un s’apprêtait à surgir du couloir devant lequel elle allait passer. Résultat : collision… Vu son frêle gabarit, Elina se retrouva sur ses fesses. Sans prendre le temps de voir qui elle venait de bousculer, elle entama directement des excuses tout en frottant son fessier endolori :

- Oww… Désolée, c’est ma faute…

Alors qu’elle continuait de se masser ses fesses endolories, Elina leva finalement les yeux pour voir à quoi ressemblait l’autre parti dans cette collision. Et il se trouvait que c’était une jeune fille aux longs cheveux… bleus ? Voilà une couleur bien singulière, mais elle-même se teignait les cheveux, elle ne trouvait donc pas le besoin de commenter là-dessus. Il n’en restait pas moins que c’était la première fois depuis son arrivée au lycée Danshi qu’elle rencontrait quelqu’un qui recourrait à une coloration pour ses cheveux. Peut-être qu’elle était nouvelle ? Pas le temps de tergiverser sur ce sujet, car la jeune fille lui tendait une main secourable qu’elle s’empressa de saisir afin de revenir sur ces deux pieds. Une fois fait, la demoiselle s’attribua une part de responsabilité dans ce qui venait de passer, estimant qu’elle n’avait pas été assez réactive que pour éviter la collision. Certes, Elina estimait que c’était elle qui était le plus en tort pour ne pas avoir fait attention à ce qui l’entourait, mais l’heure n’était pas aux excès de politesse, si bien qu’elle laissa couler sans chercher à s’accuser davantage.

Cette affaire-ci étant réglée, Elina se dit qu’elle pouvait bien se remettre à la recherche de son voleur. Après tout, plus elle trainait, plus il avait de chance de disparaître. Et alors, sans avoir les… « pièces à convictions », il serait difficile de retrouver sa trace. Néanmoins, ignorant tout de la mission qu’on lui avait mis sur les épaules, la demoiselle face à elle se présenta. Airisu Kiiro était le nom de son interlocutrice. Un nom aux consonances asiatiques, était-ce du japonais ? Elina s’était récemment mise en tête d’apprendre cette langue, pour des raisons personnelles qu’elle préférait ne pas évoquer, mais elle était encore loin d’en connaître tout le vocabulaire… Quoi qu’il en soit, bien qu’elle n’ait rien demandé, la politesse exigeait qu’elle se présente à son tour.

- Moi, c’est Elina. Elina Volchkev.

Elina avait du mal à donner son nom de famille. Non pas qu’elle en ait honte, ou quoi que ce soit du genre. C’était surtout que presque à chaque fois, lorsqu’elle le citait, les gens l’oubliaient. Trop compliqué à retenir, peut-être… Soit, maintenant qu’elles savaient comment chacune se nommait, il était temps pour elle de se remettre au travail. Encore que…

- Dis, tu n’aurais pas vu un type louche traîner dans le coin, par hasard ? Quelqu’un qui se comportait bizarrement, ou qui avait l’air de courir ?

Tant qu’à faire, autant interroger sa nouvelle connaissance, peut-être qu’elle pourrait l’aider à retrouver le criminel. Devinant que ces soudaines questions avaient de quoi surprendre, Elina s’empressa de préciser les raisons de cet interrogatoire impromptu :

- Je cherche un gars… Enfin, quelqu’un qui a… euh, volé des… sous-vêtements… Plusieurs filles de ma classe en ont été la victime, et donc, j’essaie de mettre la main dessus pour qu’elles récupèrent… enfin, tu vois quoi.

Parler de petite culotte dans un vestiaire pour filles, ce n’était déjà pas spécialement la joie, mais le faire un plein milieu d’un couloir, avec une quasi inconnue, ça l’était encore moins. Néanmoins, elle disposait peut-être d’informations cruciales, et même si ce n’était pas le cas, ça ne coutait rien de demander.