Rencontre imprévue (Daniel & Soliana)

Invité

- Dis donc, tu nous as sorti la robe soir sexy, ma chérie, s'enthousiasma Saliha.
Anaïs sourit en ouvrant la porte de son casier.
- Alooooors, reprit-elle, ton verre avec ce fameux Daniel ?
- Ça s'est bien passé, Sally. J'étais un peu nerveuse au début, il avait l'air un peu froid – en plus, il m'a surprise en voulant me faire les bises, j'ai eu un mouvement de recul...
- C'est typiquement français, ça. J'en ai connu un il y a quelques années, il avait cet air élégant et snobinard à la fois.
- Je sais, répondit Anaïs en souriant. Il s'est excusé très poliment et s'est montré irréprochable ensuite – Tu m'aides à me dégrafer le dos ?... Merci. Le dîner était très bon et la conversation tout autant. J'ai même été surprise de lui trouver autant d'humour.
- Tu vas le revoir ?
Anaïs se tortilla pour se séparer de sa robe, la rangeant soigneusement dans son casier en compagnie des escarpins.
- Je pense que oui. Il a été charmant. Et drôle.
Les deux amies se sourirent, puis achevèrent de mettre leur tenue de travail. Après les talons aiguilles, Anaïs soupira d'aise en retrouvant les ses douillets Crocs d'infirmière.
- Il est de quel élément ? demanda Saliha.
- Je ne sais pas.
- Ah ?
- Oui, il est plutôt discret sur le sujet, voire mal à l'aise.
- Récemment arrivé ?
Anaïs opina.
- Il y viendra, reprit Saliha. Pas le choix.
- Mais il sait que la magie existe. Il est professeur, avec les jeunes, c'est immanquable qu'il voit des choses – puis il m'a l'air proche de ses élèves... D'ailleurs, poursuivit-elle, j'ai pu l'observer au moment de partir.
Il me tenait compagnie tandis que j'attendais le taxi lorsque nous avons croisé une jeune fille aux cheveux bleus. Elle marchait de travers, tenant dans chaque main de gros sachets de course – probablement qu'elle revenait de la supérette et regagnait son logement étudiant. Il l'a reconnue comme étant une de ses étudiantes de sa classe et a tout de suite pris un air plus sérieux. Elle l'a aperçu aussi et s'est mise à ralentir. Là, mon taxi est arrivé et l'on s'est dit au revoir. Je suis montée dans la voiture, mais j'ai entendu ce qu'il disait à l'autre.
« Bonsoir, mademoiselle... Soliana, c'est ça ? Vous êtes surchargée, besoin d'un peu d'aide pour vous porter vos courses ? Je crois que vous habitez aux logements étudiants non loin » (j'ai cru voir ses lèvres bouger, mais je n'ai pas entendu la réponse. Daniel lui a souri) « J'insiste, ça me fait plaisir... Par contre, si nous pouvions convenir de ne pas parler de ce que vous avez vu, je vous en saurai gré. J'aimerai éviter des rumeurs. »
Saliha croisait les bras, écoutant la longue tirade.
- Et ?
- Et je suis rentrée dans le taxi et me voilà. Mais je ne sais pas, c'était un peu bizarre...
- Tu dis toi-même que c'est quelqu'un de consciencieux avec ses élèves et il vient à peine d'arriver. M'est avis qu'il veut préserver sa réputation – et la tienne aussi, soit dit en passant. Tu fais des heures dans la cité universitaire, c'est d'ailleurs là que vous vous êtes rencontrés. Tu n'as quand même pas peur de te faire concurrencer par une jeunette de vingt piges ?
- Non, non... mais je me méfie un peu, c'est tout. J'ai envie de croire en lui, mais je me suis déjà laissée avoir par Gaël...
- Combien de fois t'ai-je déjà dit de ne pas ressasser le passé ? Ce type était un pervers narcissique et tu t'en es sortie. Ce n'est pas pour retomber dedans.
- Je sais, mais...
- Anaïs !
Cette dernière leva les yeux au ciel. Saliha se comportait parfois comme sa mère.
- D'accord, Sally. Je vais ranger Gaël dans son placard.
- Et jeter la clef.
- Tu ne vas pas me sortir que je dois ouvrir mon cœur à Daniel ? soupira Anaïs.
- On ne commence jamais par le cœur, ma chérie, taquina Saliah.
Les deux éclatèrent de rire, puis allèrent travailler.

Invité

Quelle plaie ! Pourquoi est-ce que l'être humain a besoin de se nourrir, je vous le demande ? Et pourquoi est-ce que j'aime tant cuisiner ? Toujours est-il que j'ai encore fait des courses... Beaucoup de courses... Beaucoup trop. Pas terrible pour mon faible budget... Mais peu importe. Se plaindre n'arrangera pas les choses. Je ferais mieux de me dépêcher et... Oh, mais... Ne serait-ce pas l'un de mes professeurs, là-bas ? Celui de... Attendez, je vais retrouver... Mais oui, celui de littérature anglaise, bien sûr ! Le remplaçant ! Celui qui a passé un savon aux étudiants au sujet de la magie, lors de son premier cours. Je l'aime bien, celui-là. Il faudra que je pense à lui demander des conseils de livres, je suis sûre qu'il a de bons goûts. Et ce serait un bon moyen de m'améliorer encore en anglais, la littérature, donc écrit dans un langage plus que correct, et sur un sujet qui me plairait... Mais ça suffit, on arrête de rêvasser !

C'est à ce moment que je réalise qu'il me parle. Oups. Oh, mais franchement, concentre-toi, Soliana ! Je me serais frappée. Mais je réussis néanmoins l'exploit de comprendre ce qu'il me dit, je progresse ! Et maintenant, il faut répondre. Je me lance donc :

- Bonjour, Monsieur. Je vous remercie de votre aide, mais je me suis créé ces problèmes toute seule, je dois donc les résoudre toute seule.

Et je passe mon chemin. Mais, trois mètres plus loin, je suis forcée de poser mon chargement, devenu trop lourd... Alors que le professeur peut encore me voir. Mais tant pis. Je suis prête à me défendre pour lui épargner de se créer des problèmes par ma faute. Je sais que s'il insiste trop, je n'aurai pas le courage de me disputer avec lui, mais j'espère sincèrement qu'il comprendra ma façon de penser et n'insistera pas plus... Même si je dois avouer que je n'y crois pas trop. Mais peu importe. Ma petite pause terminée, je reprends mon chargement, ne pouvant m'empêcher de jeter un coup d’œil derrière moi pour voir et juger sa réaction.

Invité

- Bonjour, Monsieur. Je vous remercie de votre aide, mais je me suis créé ces problèmes toute seule, je dois donc les résoudre toute seule.

Daniel hausse les sourcils, étonné, et se retrouve à acquiescer poliment en libérant le passage.

- Je vous en prie. Pardonnez-moi d'avoir interféré.

La réponse lui laisse une forte impression de maturité, comme l'éclair qui, traversant la voûte orageuse, marque la rétine de l'observateur. Cette jeune femme paraît de type consciencieux, typiquement la première de classe discrète mais travailleuse. Si elle maintient la cadence, elle ira probablement loin.

La voilà qui avance un peu, puis qui dépose son sac. Monsieur Montpensier réprime son premier élan, celui de renouveler son offre d'aide. Une forme de respect le retient : elle veut agir seule et doit le respecter. C'est son « problème à régler seule ». Une femme comme elle a probablement embrassé le monde adulte depuis longtemps et sait comment gérer les choses, lesquelles ont de l'importance ou pas. Pour Daniel, il est rassuré : Soliana aura entendu sa remarque concernant son rendez-vous avec Anaïs, et notre homme gage que son étudiante comprend la nécessité de la discrétion.

C'est comme s'il y avait auparavant un double problème que la demoiselle aux cheveux bleus a réglé en même temps, par la force de ses épaules comme la conviction de son élocution. Comble de chance, il s'avise soudain du bandage à sa main – la blessure guérit bien, de sorte qu'il aura presque oublié son existence les derniers jours. Son effort de galanterie aurait pu le conduire à bien des misères ; pis encore, sa paume souffrante ne lui aurait peut-être pas permis d'honorer l'entièreté de l'assistance promise.

C'est donc avec uniquement le regard qu'il suivra l'évolution de Soliana, ayant bien vite du mal à la distinguer parmi les étudiants de ce début de soirée quittant le campus pour sortir en ville avec leurs amis. S'il y en a bien une qui garde toute sa tête dans les tourbillons de la jeunesse, ce doit être elle.

La poche de Daniel vibre. Il saisit son téléphone portable. « Merci pour ce délicieux repas et pour la compagnie ». Une bonne soirée, à tout prendre.

» Conversation entre les lettres. [Pv. Soliana A. Trior]
» Après la mer. [Soliana]
» Pourquoi s'enfermer dans son monde ? [PV : Soliana A. Trior]
» Regarde au-delà de ce que tu vois [soliana]
» Hola Chica [Soliana/Nando]