A new sunlight in town ~ [PV Oliver Hiroven ♥]

Dire adieu à son ancienne vie. Pour beaucoup de personnes, ce serait une épreuve si difficile, si pesante, si déboussolante. Tourner la page tout en se demandant si un jour ils pourraient revenir à leur vie d'avant, revoir leur famille, leurs amis, réintégrer leur école ou leur travail ... Aucun d'entre eux ne savait réellement ce qu'ils faisaient tous là, pourquoi ils avaient été choisis. Simplement, ils n'avaient que ce petit mot de "bienvenue", leur expliquant que cette île était tout simplement vouée à leur protection. Mais pourquoi eux en particulier ? Pourquoi étaient-ils choisis ? Bien entendu, pour certains, ce "hasard" était simplement une malédiction pour eux, pleurant tout ce qu'ils avaient perdu. Quoi de plus douloureux que de laisser derrière soi un parent, un conjoint, un enfant, juste un quelqu'un qui permet d'apprécier une petite vie tranquille ?

Mais tous n'étaient pas de cet avis. Peut-être était-elle une exception, mais la jeune allemande ne laissait presque rien derrière, simplement un travail et une associée. Une associée à qui elle devait beaucoup certes, mais dans son pays représentant ses origines, elle n'était qu'une orpheline, une ex-"délinquante" même si elle n'en était pas vraiment une, simplement victime de sa propre magie. Lorsque, peu de temps après son réveil, après ce trou noir flottant dans son esprit, ses pupilles océan eurent parcouru cette lettre d'encre et de papier, elle sut. Elle sut que cette île était pour elle une opportunité d'être quelqu'un d'autre, de se reconstruire à sa manière.

Car Lilith ne voulait plus être la petite orpheline dont personne n'avait voulu, elle ne voulait plus être qualifiée d'ex-"délinquante" à cause de ces pouvoirs qu'elle avait dû dissimuler au monde qui l'entourait. Car ici, elle ne serait pas jugée, elle ne serait pas pointer du doigt, ici, elle était une inconnue parmi tant d'autres. Bien sûr, durant ces premiers instants de solitude, seule dans cette chambre d'hôtel, elle avait cru à un rêve, surtout lorsque la belle avait eu pour réflexe de regarder par la fenêtre qui lui offrait un spectacle inédit, de nouvelles images, de nouvelles architectures. Tellement différents de tout ce qu'elle avait pu voir à Berlin.

Mais sur cette petite note anglophone, si peu explicative, la jeune femme avait tout simplement décidé d'accepter ce changement radical. La belle tracerait sa nouvelle vie comme elle l'entendait, tout comme l'aiguille de son dermographe parcourait la peau de ses clients. Son dermographe ... Elle ne se souvenait pas avoir préparé cette valise qui regroupait tout ce qu'elle avait de plus précieux, dont ce matériel de travail. Mais pourtant, elle était bien là et la berlinoise put même y retrouver son cher calepin. En première page, cette oeuvre de son passé, cet oiseau de feu maintenant reproduit à l'identique sur sa cuisse droite, l'encre s'étant légèrement estompée avec le temps bien que pourtant parfaitement soignée.

Heureusement que l'européenne s'était acharnée à apprendre la langue anglaise, simplement pour mieux comprendre les chansons qu'elle écoutait continuellement. Ainsi, elle était capable de comprendre ce langage et de l'utiliser sans aucun problème. Elle qui avait rêvé de voyager, elle se retrouvait sur une île inconnue du globe, inconnue des êtres humains normaux et de tous, jusqu'à ce qu'on les y emmène. Autant dire qu'elle était servie dans la découverte de l'inconnu.

La berlinoise n'était pas du genre à se laisser abattre dans les situations imprévues, son optimisme restait sans faille malgré tout et lorsqu'elle comprit qu'elle serait amenée à dorénavant vivre sa vie en ces lieux, elle décida de prendre les choses en main. Elle avait bien l'intention de monter son affaire d'artiste tatoueuse, et sa persévérance l'y amènerait. C'est ainsi qu'elle commença à éplucher les annonces de locaux à louer jusqu'à ce que son attention se porte sur une annonce de colocation plutôt intéressante dans sa description. Etrangement, celle-ci ne comportait aucun prix pour le loyer, ce qui intrigua Lilith. Attrapant la carte qu'elle avait reçu à l'arrivée, elle consulta celle-ci pour localiser le quartier. Une fois ceci fait, elle fouilla son sac à la recherche de son téléphone.

Composant le numéro, elle envoya un rapide SMS au numéro indiqué à la fin de l'annonce, un certain Oliver, certainement un américain pur souche ? Après quelques minutes, la réponse lui parvint, lui indiquant que la colocation était toujours d'actualité et donnant un rendez-vous au lendemain vers dix heures, directement à l'appartement en question. Tandis que la lueur crépusculaire inondée maintenant la chambre d'hôtel, la belle se décida à aller au lit, sachant qu'un lever à l'aube l'attendait pour le lendemain. Bien sûr, elle ne connaissait point cette île et devrait certainement chercher un peu pour trouver le lieu de rendez-vous. Bien que plutôt débrouillarde, elle n'était pas à l'abri de se perdre, mais avec un joli sourire, elle pourrait certainement se trouver des alliés.

Après une nuit relativement sereine, la jeune tatoueuse était prête à affronter cette nouvelle journée, et surtout cet entretien de colocation. Après avoir pris un déjeuner copieux, plus par gourmandise que par faim, elle se dirigea dans sa salle de bain pour prendre sa douche avant de bien réfléchir à une tenue présentable. Alors qu'elle retournait assez négligemment sa valise, elle chercha sa tenue favorite, composé d'une jupe blanche et jaune habillée d'une ceinture ornée d'un CD, ainsi qu'un haut noir noué par un lien doré au niveau de sa poitrine. Enfilant ses vêtements, elle put enfin terminer le tout de ses hautes bottes noires et de ses bracelets de cordons noirs autour de ses poignets.

Une fois prête, légèrement maquillée et bien coiffée, la belle partit à l'aventure sur l'île d'Awashima, affublée de cette carte telle une exploratrice en safari. Elle prit les transports en commun, sans doute la situation la plus judicieuse pour éviter de s'égarer, il serait bien dommage de louper une opportunité d'avoir un lieu de vie confortable. Prise dans sa rêverie, elle loupa son arrêt de bus et dû se stopper au suivant, la forçant à marcher jusqu'au quartier résidentiel. Emerveillée par la beauté de celui-ci, elle sourit, plutôt satisfaite de sa trouvaille et sortit son téléphone de sa poche pour vérifier l'heure et l'adresse. Neuf heure cinquante, elle était à l'heure, elle avait bien eu raison de partir de bonne heure.

Entrant dans le bâtiment, Lilith chercha le numéro indiqué par le fameux Oliver et une fois devant la porte de chêne, elle y toqua deux fois, de façon assez assurée. Joignant ses mains, elle attendit posément que son hôte ne lui ouvre. Elle crut entendre un air qu'elle aimait beaucoup provenir de l'intérieur, Red Hot si elle ne se trompait pas. Elle sourit, contente que les gouts musicaux du garçon s'accordent bien aux siens.

"On rencontre sa destinée souvent par les chemins qu'on prend pour l'éviter." Dixit Jean de la Fontaine.... "Ou alors en ouvrant une simple porte..." Dixit Oliver Hiroven

Ce n'était pas une journée comme une autre qui se profilait pour Oliver. Cette journée marquait pile une semaine, déjà une semaine qu'il s'était retrouvé comme "par enchantement" sur la plage de l'île, une semaine que l'américain avait rencontré Johan et ses dessins. Depuis, Oli n'avait pas chômé. Il n'avait fallu que de quelques minutes de connexion à Internet pour prendre contact avec son père, lui expliquer qu'il souhaitait prendre un nouveau départ loin de Seattle et qu'il avait besoin d'un soutien financier pour débuter. Sans aucune surprise son paternel accepta sans poser de question, ces deux-là ne s'étaient jamais compris mais sa réaction serra le cœur du natif de Seattle, il aurait tellement voulu que son père émette quelques réserves, qu'il essaie de comprendre pourquoi Oliver souhaitait s'éloigner. Ce dernier savait qu'il ne pouvait pas donner les véritables raisons de son exil à son père mais quand même.... Enfin bref, maintenant le jeune homme était installé dans le plus beau quartier de la ville dans un appartement beaucoup trop spacieux pour lui et il ferait tout pour démarrer une nouvelle vie ! Ce qui nous amène indubitablement à cette fameuse matinée. Oli bien qu'il n'en avait pas réellement besoin avait fait passer une annonce pour se trouver des colocataires histoire d'avoir des connaissances et pourquoi pas se faire des amis. Pour se faire, le mélomane avait déposé une annonce sur le site de la ville dans la rubrique des logements. Il avait du néanmoins attendre quelques jours pour avoir une réponse et enfin, hier, il avait reçu un sms au sujet de son annonce. Le blondinet aurait presque sauté de joie si il n'avait pas eu un de ses précieux vinyles à la main, celui du groupe Depeche Mode intitulé "Violator", le meilleur selon lui. Le texto était signé "L" ainsi le prénom de son futur pote commençait par L, L comme Léon ou Léonard ? Il y avait tant de possibilité, à tel point que la personne intéressée par l'annonce était peut-être fan de Death Note d'où le pseudo en signature. La seule chose dont il avait la certitude était que si il était en possession de ce fameux cahier de la mort il n'aurait pas posté une annonce pour une collocation ! Oliver se mit à rire tout seul suite à cette anecdote qui venait de traverser son esprit. Il faudrait vraiment qu'il profite de cette nouvelle vie qui lui est donnée pour sortir un peu plus et ne pas resté enfermé dans son appartement.

Pour la première fois depuis son arrivée sur l'île, il s'était servi de son réveil afin de tout préparer pour en mettre plein la vue à son futur nouveau colocataire. Même si lui même n'avait pas encore déballé toutes ses affaires, Oli avait nettoyé l'appartement de fond en comble. Poussant les cartons dans l'entrée de sa chambre qui était d'ailleurs une des pièces les plus grandes de l'appartement. Le natif de Seattle l'avait choisi non parce qu'il avait la folie des grandeurs mais que cette pièce serait très utile pour ses projets futurs. Oliver pouvait ainsi y installer un bureau pour ses études et pour la gestion de sa boutique en ligne de CD/Vinyls et parfois même d'appareils pour écouter de la musique. D'ailleurs en parlant de musique, ce matin c'était "Californication" des Red Hot Chilli Peppers qui passait en boucle alors qu'il se préparait. Malgré l'âge avancé de cette chanson, il l'adorait et il n'était pas rare qu'il l'écoute très régulièrement. Durant ses années à l'internat, le blondinet avait même travaillé sur la chanson, son sens caché ce qui avait renforcé son intérêt pour le groupe, on peut même dire qu'il s'est beaucoup intéressé au groupe suite à cette chanson qu'un des étudiants un peu rockeur dans l'âme aimait bien passé en boucle lorsqu'il était en charmante compagnie.... Oliver sortait tranquillement de la douche, se séchant rapidement pour enfiler par la suite un pantacourt caki avec un tee-shirt jaune avec un soleil orange imprimé dessus. Le jeune garçon aurait bien mis son tee-shirt un peu plus rock'n roll mais la peur de "mal passer" auprès de son futur colloc le fit se raviser. Une serviette bleu océan entortillé autour de la tête, il sortit de sa chambre afin de préparer le café et éventuellement des bricoles à grignoter si la personne censée venir aurait une petite faim. Rien ne devait être laissé au hasard, rien du tout ! Dans quelques minutes il allait jouer une partie de son avenir, soit il allait se faire un nouvel ami, soit il allait retourner dans les affres de la solitude dans un fond musical des plus tragiques. Peu sûr de lui, il avait même déjà choisi la musique qu'il écouterait cette après-midi, une composition d'un chanteur français, Aaron d'où la chanson Lilli traite d'un protagoniste junkie et d'un autre qui souhaite lui fournir son aide, niveau mélodramatique il n'y a pas mieux !

Oliver ouvrit un placard pour en sortir une boite de filtre à café. Etant un adepte de ce délicieux breuvage capable de vous donner une bonne dose d'énergie pour les veillées nocturnes par exemple il se devait d'en préparer pour son invité. Se battant tel un chasseur face à un lagiacrus lors d'une partie de Monster Hunter (un des seuls jeux qui trouvait grâce à ses yeux en plus de la saga des Final Fantasy) il parvint enfin à défaire l'emballage pour se saisir d'un filtre qu'il positionna aussitôt dans la machine à café. Depuis quelques jours il avait l'habitude d'aller chercher son café dans la boutique du coin ainsi pas besoin de livrer une telle bataille à chaque fois qu'il souhaitait se désaltérer, après tout son peuple avait fait la guerre d'indépendance et non celle du café ! Le jeune homme s'abaissa ensuite pour fouiller dans un nouveau placard à la recherche cette fois du café, ben oui on ne fait pas de café sans café ! Mais à la différence de la boite à filtre il fit tomber celle contenant le café. Oliver laissa échapper un"Merde !" qui, malgré la musique, raisonna dans tout l'appartement avant de se redresser se touchant le front. Ayant conscience de se mettre trop de pression, il souffla un bon coup lorsqu'il entendit la sonnette de l'appartement retentir.... un coup rapide à l'horloge et Oli constata qu'il était déjà dix heures, l'heure fatidique. Le garçon pourtant si enthousiaste à l'idée de partager son appart avec une personne se figea quelques secondes, et si il avait commis une effroyable erreur en postant cette annonce, il était peut-être fait pour vivre tout seul comme un vieil ermite au fin fond d'une grotte ? Non, Oliver ne voulait plus être seul et se précipita vers l'entrée tout en appuyant sur le bouton de la machine et ayant conscience qu'avec son temps de réaction très proche de celui d'un escargot son futur pote venait peut-être de se faire la malle. Il ouvrit enfin la porte....

Le regard océan de l'américain se posa sur la personne qui venait de sonner, la personne qui avait répondu au sujet de son annonce, la personne qui lui permettrait de commencer une nouvelle vie plus attrayante que celle qu'il avait quitté dans les rue de Seattle... et cette personne était en fait une femme ! Oli ne savait pas du tout comment réagir, lui qui avait pensé à toutes les situations possibles et inimaginables n'avait pas pensé que ce fameux "L" pouvait être le début d'un prénom de fille ! Oui une fille ! Tenant la poignée de porte d'une seule main, la deuxième était posé sur sa hanche, le jeune homme ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit. Une fois quelques secondes passées dans un silence des plus gênant pour le garçon, il réussit enfin à dire : "Euh bonjour ! Je suis Oliver et je présume que vous êtes "L" ?" Marquant une pause il n'hésita pas à détailler la jeune femme qui se trouvait être très belle, de long cheveux blonds comme les blés descendant jusqu'au creux des reins, un regard azur et une tenue très jolie également. Bon même si il n'avait pas à faire avec un homme, il n'était pas en présence du clochard du coin ce qui était un bon point également. "Ah oui entrez ! J'en oublie les bonnes manières." L'Américano-Finlandais s'écarta pour laisser entrer "L". Tous deux dans le long couloir de l'entrée, Oli entreprit de détailler tout de suite l'appartement dans les grandes lignes. "Alors ici c'est le couloir de l'entrée, qui une fois à gauche débouche directement sur la salle, salon avec cuisine ouverte, la plus grande pièce de l'appartement. Sinon vous verrez que c'est comme dans l'annonce, trois chambres, une salle d'eau, salle, salon et cuisine donc." Une fois dans la pièce principale, il invita la jeune femme à prendre place dans le sofa histoire de faire plus ample connaissance. Pas question de faire visiter l'appartement avant d'en apprendre plus sur elle et de savoir ce qu'elle recherche exactement dans une collocation. Elle avait beau être jolie, Oliver devait s'assurer d'être tombé sur une personne lui correspondant un minimum.

Une étrange odeur parvint jusqu'aux narines du blond qui percuta immédiatement. "Zut la machine à café !" Partant sans attendre en direction de la cuisine, la jolie inconnue pouvait tout de même ne rien rater de la scène car de sa position elle avait une vue imprenable sur la cuisine et sur la cafetière désormais fumante. Et oui c'est ce qu'il arrive lorsque l'on fait un café sans y ajouter d'eau, on obtient du café bouilli, malodorant et brulant. Oliver débrancha la cafetière et dit en direction de la blonde : "Bon j'espère que vous n'êtes pas une fan de café car là c'est rappé, j'ai encore tout foiré. " Il baissa la tête en signe de dépit avant d'activer la hotte aspirante afin d'évacuer un maximum de fumée et d'odeur et revint vers son invité, un sourire dépité aux lèvres. "Voilà vous voyez maintenant quel genre de boulet est le proprio..."  Oli se laissa tomber dans le fauteuil positionné en face du sofa dans un profond soupir se voyant déjà mettre sa musique mélancolique dans sa chaine Hi-Fi. " A la base j'avais prévu de vous servir un café pour les présentations mais j'imagine qu'une purée de café et très mal indiqué, souhaitez-vous quelque chose d'autre ? Il y a des sodas de différents parfums, de l'eau minéral également." Il se redressa afin de paraître plus présentable fixant son interlocutrice, se disant qu'elle était très jolie sans pour autant avoir de pensée malsaine à son encontre.

Oliver tendit alors sa main droite vers Lilith espérant serrer la sienne : "Alors je m'appelle Oliver Hiroven, je suis étudiant en histoire, fan de musique et je crois que c'est tout, il n'y a trop rien à dire sur ma personne et si vous avez des questions je me ferai un plaisir d'y répondre mais sachez que je ne fais pas de vague et que je suis discret dans la vie de tous les jours, si l'entretient se passe bien vous pouvez considérer que vous êtes chez vo... Oh vous avez un tatouage ?" Ses yeux venaient de se poser sur le cœur dessiné à l'encre indélébile sur l'avant bras gauche de la femme.

Coupée du monde, ses écouteurs aux oreilles, Lilith marchait sous ce soleil de plomb. A peine dix heures du matin que celui-ci réchauffait déjà sa peau de porcelaine. Elle était peu habituée à cela, elle qui venait d'un pays au climat tempéré, le soleil était bien trop peu au rendez-vous  dans ce ciel d'Allemagne qu'elle fut forcée de quitter dans cette transe incontrôlable. Nul ne semblait savoir pourquoi chacun d'eux se trouvait sur cette île et la belle ne s'en préoccupait que très peu, même pas du tout. De toute évidence, elle ne manquerait de toute façon à personne, alors pourquoi s'encombrer l'esprit de questions inutiles ? Peut-être son associée serait-elle attristée d'apprendre sa disparition, ou peut être profiterait-elle pour lui voler ses clients. Cela n'avait plus aucune once d'importance pour la berlinoise, elle comprenait parfaitement que sa vie dorénavant était ici, sur cette terre inconnue.

Pourquoi devrait-elle refuser une nouvelle opportunité ? Celle d'être quelqu'un d'autre ? Celle qui lui enlèverait cette  réputation infondée de délinquante qu'elle avait toujours trainé derrière elle ?  Certes, comme elle le disait souvent, elle avait fait des "conneries" dans sa jeunesse et elle ne pouvait que les assumer, son cadre "familial" ne l'avait pas réellement aidée, si l'on pouvait se permettre de parler d'un cadre familial ... Sans famille ... Orpheline ... Elle n'en saurait certainement jamais la raison si bien soit-elle noble ou égoïste, mais une nouvelle fois, ceci n'avait aucune importance. A quoi bon en vouloir à ces géniteurs inconnus ? A en vouloir au monde entier ? La tatoueuse avait simplement fait son petit bonhomme de chemin et jamais elle ne le regrettait. Son parcours, elle l'avait effectuée seule. Sa réussite, elle la devait à son coup de crayon fabuleux et tout de même un peu à sa formatrice.

Cette optique d'une nouvelle vie l'avait poussée à éplucher les annonces du net afin de trouver un nouveau logement pour ensuite réfléchir à son "avenir". Elle n'avait aucune attention d'abandonner sa carrière de tatoueuse et ferait ce qu'il faut pour se faire une nouvelle clientèle sur Awashima. Quitte à être serveuse ou autre, elle réunirait assez d'argent pour monter sa propre affaire, bien trop ambitieuse pour abandonner ses rêves. Et pourquoi pas retourner à cette seconde passion pour la chanson, faire profiter de sa douce voix angélique ? Elle verrait bien. Pour le moment, il lui fallait juste faire bonne impression à cet étranger qu'elle allait rencontrer dans quelques minutes.

Son Ipod aux couleurs dorées accroché à sa ceinture, bien qu'il contienne une playlist assez impressionnante, restait bloqué sur une seule chanson, celle qu'elle avait choisie en ce début de journée Starlight du célèbre groupe Muse qu'elle suivait depuis plusieurs années. Pourquoi cette chanson ? Elle ne le savait guère, juste une envie d'entendre cette mélodie en ce début de journée ensoleillée. Bien que beaucoup d'yeux se tournaient vers elle pour admirer sa silhouette parfaite, Lilith ne s'en formalisait pas réellement, son esprit vaquant à ses pensées.

Ce ne fut que lorsqu'elle se présenta devant l'immeuble, potentiellement son futur logement, qu'elle éteignit son appareil, ôtant ses écouteurs en entrant dans le bâtiment. Elle n'avait beau avoir reçu aucune éducation digne de ce nom, la belle avait tout de même de la tenue et ne voulait pas paraitre impolie. Enfin, elle trouva la porte indiquée et elle put constater avec joie que le son claironnant derrière celle-ci lui convenait particulièrement, pile ses goûts musicaux, même si la chanson n'était pas toute jeune. Sans le savoir, son futur colocataire avait déjà un bon point pour lui.

Elle toqua ce bois de chêne avec assurance : une fois, deux fois ... Puis attendit patiemment, quelques minutes. Aucune réponse, mais pourtant elle entendit clairement une injure un peu étouffée par la musique. Supposant qu'il ne l'avait pas entendue, elle se permit d'appuyer une fois sur la sonnette ornant l'encadrement de la porte. Un son si banal, mais certainement beaucoup plus fort que les coups portés par ses phalanges. Encore quelques instants à patienter, l'européenne entendit enfin des bruits de pas précipités. Peut-être s'était-elle présentée trop tôt au rendez-vous ? Vers dix heures ne voulait pas dire dix heures tapantes, mais elle n'avait pu attendre plus longtemps, l'allemande avait bien trop hâte de se faire un nouvel ami, enfin c'était ce qu'elle espérait.

La poignée tourna sur elle-même, laissant place au léger grincement de la porte qui s'ouvrait. Restant sur le seuil, Lilith afficha un large sourire, comme un automatisme. Ce fut un jeune homme d'une vingtaine d'années qui se présenta à elle, plutôt mignon songea-t-elle mais elle dut se mordre la lèvre pour cacher son amusement face à lui. Il était plutôt rare d'accueillir un inconnu avec une serviette sur la tête, mais dans un sens, la belle en fut rassurée, peut être était-ce simplement le signe d'une attitude "cool". Elle fut quelque peu saisie par l'étonnement se lisant sur le visage de son interlocuteur, avait-elle quelque chose sur le visage, le mascara qui avait coulé ? Elle le vit hésitant avant de poser une question plutôt rhétorique. Elle répondit simplement un "Oui.", agrémenté d'un hochement de tête, les lèvres toujours étirés en un sourire sympathique.

Bien sûr, elle ne s'était pas totalement présentée, signant simplement de son initiale. Peut-être s'attendait-il à un homme tout simplement ? Lorsqu'il l'invita à entrer, elle le remercia posément, s'exécutant en quelques pas, n'osant pourtant pas trop s'avancer dans l'appartement. Elle scruta discrètement la pièce qu'elle pouvait apercevoir du couloir où elle se trouvait, plutôt agréable à l'oeil. Lumineux et spacieux, sympathiquement décorés, les lieux trouvaient grâce aux yeux de la jeune femme. Silencieuse, elle écoute attentivement les dires du jeune garçon, essayant d'imprimer rapidement ses explications, elle avait simplement hâte de visiter les lieux. Elle le suivit jusqu'à la pièce principale s'avérant donc être le séjour, attendant qu'il lui propose de s'asseoir pour s'installer sur le canapé qu'elle trouva immédiatement très confortable. Curieusement, elle devinait la valeur des meubles bien agencés dans la pièce.

Une odeur de brûlé ne tarda pas à flotter dans l'air, alertant Oliver d'un oubli de machine à café selon ses dires. Avec curiosité, et toujours en essayant de dissimuler un petit air amusé, la berlinoise le suivit du regard tandis qu'il se dirigeait vers la cuisine. La pauvre cafetière semblait connaitre quelques mésaventures avec lui. Les quelques réflexions de son interlocuteur la fit sourire un peu plus et ces quelques mots prononcés lui indiqua qu'elle faisait face à un anglophone natal, tout comme il était facile de deviner les origines de la balle blonde. Un sourire en coin, elle l'observa, lui et son air dépité se laisser tomber dans le fauteuil face à elle, osant une petite plaisanterie qui permettrait de briser la glace.

"On ne se méfie jamais assez d'une cafetière vous savez." rit-elle doucement. Puis elle reprit plus sérieusement : "Un verre d'eau suffira, merci beaucoup."

Etrangement, elle se sentait beaucoup trop solennelle et peut être paraitrait-elle beaucoup trop "sage" aux yeux de son hôte, mais elle ne voulait montrer son côté parfois trop excentrique dès les premières minutes de leur rencontre. Il lui tendit la main qu'elle serra sans hésitation, commençant  à se présenter à elle, donnant quelques précisions sur ses loisirs et goûts. Son attrait soudain pour l'encre dessinée sur sa peau eut pour mérite de la surprendre quelque peu. Souriante, elle se détendit.

"Oui en effet, j'ai un tatouage ... Enfin ce n'est pas le seul pour être honnête ! Disons que c'est le seul que l'on peut apercevoir ..." Doucement, elle extirpa sa main de la sienne pour ne pas que la scène ne devienne trop étrange et releva sa chevelure des blés avant de se retourner pour exposer sa clé de sol gravée à jamais sur sa peau. Elle resta immobile un instant avant de relâcher sa prise, laissant retomber ses longs cheveux en cascade dans son dos. Se retournant pour reporter son attention sur l'anglophone, elle lui sourit en lui serrant brièvement, mais chaleureusement, la main de nouveau. "Je suis enchantée de faire ta connaissance Oliver, je pense que l'on peut peut être passer sur le vouvoiement tu ne penses pas ? Je m'appelle Lilith R. Engel, il se trouve que j'aime beaucoup la musique moi aussi ! Très bon choix d'ailleurs ! Californication si je ne me trompe pas." Elle se permit un petit clin d'oeil avant de continuer d'un air plus sérieux. " Ce que je vais dire ne va certainement pas jouer en ma faveur mais autant jouer cartes sur table, pour le moment, je n'ai pas de job ... En fait, j'ai pour espoir de continuer le métier que j'exerçais avant d'atterrir ici. Je suis tatoueuse et j'ai pour projet d'économiser pour ouvrir mon salon." Elle se stoppe un instant. "Dans ton annonce, tu ne parles pas du loyer, je suppose qu'il est à négocier ... Mais rassures-toi, je compte bien trouver un travail temporaire pour payer ma part, cela va de soi bien entendu. Juste ... C'est assez inhabituel de trouver une annonce de collocation sans information sur le prix du loyer et des charges."

A cet instant, l'européenne se trouva complètement idiote. Se présenter à un tel entretien sans avoir de revenu était du suicide, jamais Oliver n'accepterait de partager son appartement avec une chômeuse sans un rond, bien qu'elle ne doutait en rien de sa capacité à trouver un job assez rapidement. Mais l'honnêteté primait chez la demoiselle, elle ne se serait certainement pas laissée aller aux mensonges afin d'assurer une réponse positive. Aussi, tenta-t-elle de rattraper cette maladresse en s'intéressant un peu plus au jeune homme.

"Donc tu aimes la musique ? Un style ou un groupe en particulier ou tu écoutes de tout ?"

Aussi douée soit-elle pour embobiner les gens, elle doutait que ce changement radical de sujet ne fasse oublier au jeune homme que sa colocataire candidate était délibérément fauchée, enfin pour l'instant. Mais elle savait qu'une passion était une passion et qu'elle permettait de créer des liens lorsqu'elle était partagée. Mais de nouveau, la droiture de la jeune femme reprit le dessus. Elle soupira, un peu dépitée à son tour.

"Enfin j'imagine que tu n'as peut être pas de temps à perdre à discuter avec moi si je ne peux pas t'assurer un paiement immédiat ... Je comprendrais bien entendu, j'aurais peut être dû préciser ma situation avant de me pointer comme ça à ton appartement ... En tout cas, il est plutôt chouette, j'aime beaucoup la déco !"

Le rose aux joues, l'artiste se rendit compte qu'elle parlait beaucoup trop et décida de se stopper un instant, histoire de laisser Oliver réagir, bien consciente de déblatérer tout ce qui lui passait par la tête parfois. Le verre d'eau serait éventuellement le bienvenue afin d'hydrater cette gorge devenue bien sèche suite à ce flot de paroles plus inutiles qu'autre chose. Elle venait de lui dévoiler l'un de ses traits de caractères pouvant être perçu comme un réel défaut : elle était un vrai moulin à paroles, l'antithèse parfaite de la discrétion de ce gars au regard si similaire au sien. Car elle avait bien remarqué cet océan d'innocence et de naïveté chez lui, sans doute n'avait-il pas connu tant d'épreuves qu'elle dans sa vie. Ou peut-être le cachait-il parfaitement bien ?  

Elle espérait qu'il ne mette pas fin à cette entrevue, qu'elle puisse le convaincre de lui faire confiance, même si il serait bien étrange d'accorder sa confiance à une parfaite inconnue. Lilith savait qu'être jolie ne pourrait la sortir de toutes les situations embarrassantes.

Mais quel empoté ! Non, un véritable boulet blond de compétition ! La tête partout sauf sur son corps, Oli avait oublié d’ajouter de l’eau dans la cafetière, ce qui eut pour effet de provoquer une véritable réaction en chaîne. Il n’y avait pas besoin d’être un expert en dégustation et de faire comme les professionnels pour déchiffrer les arômes de ce café. En outre, agir par étape, en numéro un : La perception visuelle… oui la fumée qui émane de l’appareil est parfaitement visible ! En numéro deux : La perception olfactive… une nouvelle fois oui, humer la richesse de cet arabica riche en molécule aromatique des pays d’orient n’est plus à faire, l’odeur était partout dans l’appartement et grâce au travail d’Oliver il y en aurait pour un moment à la faire partir ! En numéro  trois : La dégustation… Euh Joker même si il est américain jamais Oli ne s’y tenterait, le café bouilli non merci ! En conclusion, le jeune homme était en présence d’un café mal fait ou pas fait du tout selon l’appréciation de certaines personnes et bien qu’il n’était pas un expert en la matière il le savait très bien ! La jolie blonde qui était intéressée par son annonce de collocation allait prendre ses superbes jambes de mannequins à son cou et se tirer vite fait bien fait. L’Américano-Finlandais tentait de ne rien laisser transparaitre de son stress qui venait soudainement de l’envahir, aussi il tenta de la jouer « naturel » malgré les signes de dépits apparaissant bien malgré lui sur son visage en proposant d’autres boissons à la dénommée « L ». L’avantage c’est que cette situation cocasse avait permis de mettre en lumière le fait que la jeune femme n’était pas du genre à faire la gueule pour des queues de cerise, elle s’amusait même de la situation disant au blondinet gaffeur qu’on ne se méfie jamais assez des cafetières !

« Si vous saviez ! Une fois j’ai pourri la Senseo d’un ami au pensionnat, je mets une dosette, jusque-là normal et bim la machine se bloque ne voulant pas me servir mon café. Je suis resté en face à maugréer pendant une bonne heure avant de me rendre compte que là aussi je n’avais pas mis un centilitre d’eau pour la faire fonctionner… » dit-il avant de serrer la main de son interlocutrice en signe de « bonjour » solennel. Elle accepta avant de mentionner qu’un verre d’eau serait amplement suffisant pour étancher sa soif. Oli fit un signe de tête affirmatif  tout en parlant et s’apprêtait à aller chercher le liquide quand il bloqua sur le tatouage de la belle. Pour le moment, elle avait tout du colloc idéal : Jolie et tatouée ! Mais comme le dit l’adage, il ne faut pas juger un livre à sa couverture sinon il n’aurait jamais lu la célèbre série Harry Potter de J.K.Rolling . Chez lui en Amérique la couverture du premier tome est horrible, il n’y a pas de mot. On y voit un gamin ressemblant fortement à René la Taupe sur un balai sous une arche en train de brandir un caillou ! Super comme accroche, avec ça c’est sûr tous les gamins fan d’une taupe volante vont lire le bouquin ! Oliver reprit vite ses esprits quand la tatouée devant lui, lui tourna le dos relevant sa chevelure pour lui montrer un autre tatouage, il laissa échapper un : « Wouaaaah » admiratif mais aussi très peu audible mais assez pour que Lilith l’entende malgré lui. La tête plein d’étoile, se laissant serrer la main une nouvelle fois, le blond était clairement sous le charme de la blonde, une certaine Lilith R.Engel d’après ce qu’il avait imprimé. Après le « L », il avait le droit à un « R » dans le nom mais ce n’était pas gênant il pourrait peut-être aborder ce sujet un peu plus tard dans la conversation.

Secouant légèrement la tête, se rendant compte qu’il avait oublié de servir un rafraîchissement à Lilith, Oli repartit en direction de la cuisine d’où la fumée commençait à s’estomper. Désireux de mettre les petits plats dans les grands, il sortit de l’îlot central un petit plateau de bois avant d’y déposer une carafe pleine d’eau ainsi que deux verres. Revenant dans le salon, il dit : « Voilà tu peux te servir, fais comme chez toi ! »

S’asseyant de nouveau dans son fauteuil, posant sa jambe droite sur sa gauche à la manière d’un psychologue écoutant son patient. « Hum… Californication… Oui c’est ça… » Oli était des plus sérieux lorsqu’il s’agissait de musique, adorant ça il ne plaisantait jamais sur ce sujet ah moins que lui-même trouve une anecdote marrante. Cependant, il ne put s’empêcher de s’empourprer légèrement quand Lilith lui fit un petit clin d’œil mais rapidement il analysait la situation que Lilith lui explosait. Elle s’y connait en musique bien que Californication des Red Hot était très connue… check ! Elle est jolie et tatouée de surcroit… check ! Elle se présente à un entretien pour une future collocation alors qu’elle n’a aucun revenu… check aussi ! C’était peut-être ce petit grain de folie que l’Américain avait besoin dans sa nouvelle vie afin d’éviter de retomber dans ses travers de jeune homme pépère à flemmarder dans un coin de sa chambre à écouter Evanescence et de se prendre pour Daredevil ! C’est surtout lorsque que Lilith lui mentionna son ancienne profession qu’une étincelle s’alluma dans le regard d’Oliver. Tatoueuse… elle est tatoueuse, c’est une TA-TOU-EUSE …. Le blondinet bondit sur ses deux jambes, difficile de rester en place sachant qu’il voue littéralement un culte à toutes personnes exerçant, selon lui, le plus beau métier du monde.

« Mais c’est super ça !!! Trop génial !!! Tu as une longue expérience dans ce domaine ? Tu as un domaine de prédilection niveau style ? Une technique préférée en particulier ? Oh ! Euh attends je suis sûr que tu es une adaptes du style Levithan Cross, c’est à la mode ces derniers mois ou alors tu es plus dans le biomécanique ? Oh putain ça va trop le faire d’avoir une colloc tatoueuse ! » Dit-il avant de contourner son fauteuil et de se diriger vers sa chambre. « Ne bouge pas faut absolument que je te montre un véritable chef d’œuvre d’un artiste local ! Je te jure qu’il remballe des artistes comme Alice Carrier ou Kate Von D ! Je n’avais rien vu de comparable avant mon arrivée ici et je pense que si un jour j’ai le courage ce motif ira directement sur ma main gauche. » Le jeune homme revint rapidement avec un cadre contenant le dessin de rose que lui avait donné Johan, le sympathique dessinateur qui l’avait aidé lorsqu’il se baladait en pyjama dans la forêt. Oli avait conscience qu’il devait beaucoup à cette personne et il espérait sincèrement s’en faire un ami proche dans le futur. Pour lui cette île était une véritable bénédiction, il pourrait refaire sa vie, se faire des années avec toujours plus de musique aussi ! « C’est un dénommé Johan qui m’a beaucoup aidé lors de mon parachutage sur l’île qui l’a dessiné. Regardes ce coup de crayon, je n’avais pas vu une telle précision depuis très longtemps ! Qu’est-ce que tu en penses ? »

Pour le moment, il avait complètement éludé la question du loyer et du fait que l’allemande n’avait pas un rond pour y participer et pour être honnête ça n’inquiétait pas Oliver le moins du monde, après tout il était propriétaire de cet appartement, enfin son père mais ça c’est un détail. L’annonce était juste un subterfuge pour trouver des amis potentiels. Une fois l’euphorie passée et un peu calmée, Oliver répondit à Lilith : « Oui j’adore la musique, autant que les tatouages. J’écoute de tout bien que si je devais te donner mon style préféré ma réponse s’orienterait plus vers le Pop/rock et si je devais te donner le style que j’aime le moins ce serait la musique classique. Pour ce qui est des groupes, je fais dans le traditionnel comme Depeche Mode, U2, Red Hot et Green Day bien que certains « jeunes » comme Fall Out Boy retiennent mon attention. Je ne crache jamais sur l’occasion d’écouter les groupes amateurs aussi, je trouve qu’ils ne sont jamais jugés à leur juste valeur mais malheureusement la musique est un domaine où le business et le capitalisme sont maîtres. »

Se repositionnant dans son fauteuil, il se pencha pour attraper la carafe pour se servir un verre et scruta Lilith du regard afin de savoir s’il devait lui en servir ou resservir un, n’ayant pas fait attention si elle s’était déjà désaltérée. Une fois fait, il porta le verre à ses lèvres afin de boire. Oli ne s’était pas soucié du fait d’avoir trop parlé ou non, il était comme ça lorsqu’un sujet pouvait le passionner et ça ne l’avait jamais offusqué puisqu’à part ce moment avec Lilith il n’avait jamais pu parler de ses passions avec d’autres personnes. Ce qui était sûr c’est qu’il ne serait jamais nostalgique de l’époque des pensionnats, trop de personnes méchantes se sont moqués de ses passions l’appelant le geek ou encore le no-life. Même si elle déciderait de partir, il aurait pu, pour une fois, parler sans retenu et ça ça n’avait aucun prix ! L’américain se devait par politesse de jouer lui aussi cartes sur table, être honnête comme venait de le faire la tatoueuse. Si lui acceptait bien volontiers le fait qu’elle n’avait aucun moyen de paiement pour le moment est-ce qu’elle accepterait aussi bien le fait que cette annonce avait surtout pour but de rencontrer des gens ? Comment réagirait-elle en découvrant qu’il pouvait gérer lui-même le prix du loyer ? Commencer une nouvelle vie par des mensonges n’était pas la solution la plus adéquat et ça Oliver le savait. Il serait honnête jusqu’au bout ! Dans un léger raclement de gorge, il prit encore une fois la parole :

« Comme tu as joué la carte de l’honnêteté, je me dois de faire de même Lilith. Si j’ai passé cette annonce avant tout c’est pour faire des rencontres… Attention par le genre de rencontre que tu peux croire mais pour me faire des connaissances, des amis. Dans mon ancienne vie je n’étais pas du genre très sociable, préférant rester à l’écart avec ma musique et mes hobbies. » Il inspira « Je… enfin mon père est riche, pour ainsi dire cet apparemment m’appartient mais je t’arrête tout de suite, je ne suis pas le genre fils à papa notre relation est quasi-inexistante et je compte bien me débrouiller par mes propres moyens avec ma boutique de musique en ligne qui est en préparation. » Le blondinet se releva se dirigeant une énième fois vers la cuisine pour couper la musique l’air solennel. « Pour faire court, tu n’auras pas besoin de payer de loyer le temps que tu retombes sur tes jambes, si on accroche et que tu le souhaites, tu es la bienvenue ici ! »

Il avait toujours été comme ça, gentil, serviable près à défendre la veuve et l’orphelin dès que l’occasion se présentait. Cela lui avait valu par le passé de cruelles déconvenues par la faute de personnes malintentionnées voulant abuser de sa gentillesse et Oli en avait beaucoup souffert mais cette Lilith semblait si gentille. En plus d’avoir pas mal de points communs avec lui elle était dans une situation précaire alors pourquoi ne pas lui apporter son aide ? Puis d’un côté si jamais elle était une psychopathe tatoueuse il aurait au moins le mérite de se faire trucider par une belle femme, dans les films d’horreur les méchants sont toujours moches alors là ce serait une première. L’étudiant en histoire brisa le silence qui venait de s’installer et pointa le couloir d’entrée qui était visible de leur position. « Initialement l’annonce était pour deux personnes mais j’aurais peut-être une idée si jamais tu chercherais un local pour ton métier. Je trouve ça dommage que tu ne puisses pas exercer ton métier alors on pourrait s’associer si le cœur t’en dis. Bien évidemment après avoir fait plus ample connaissance. Ce couloir ferait une salle d’attente parfaite et le mur au fond n’est pas porteur, on pourrait le casser et condamner l’autre sortie pour en faire ton propre salon…. »

Sachant que ce qu’il proposait était complètement fou, il s’arrêta. La jeune femme allait le prendre pour un fou c’était sûr. Déjà Oliver ne comprenait pas pourquoi elle n’avait pas encore mis fin à leur entretien. C’était invraisemblable, ne la connaissant que depuis quelques minutes, une demi-heure à tout casser et déjà il lui propose la place de coloc alors qu’elle n’a aucune source de revenu et maintenant ce boulet lui propose un local pour exercer son taff. Appelez l’ONU vous avez un candidat pour un prix nobel là ! Finalement, l’américain se rendit compte qu’il n’aurait pas dû couper la musique car un silence gênant allait très certainement s’installer suite à ses déclarations. Le pire c’est qu’il venait de se rendre compte qu’il ne lui avait pas répondu à son compliment au sujet de la décoration mais Oli jugeait bon qu’il faudrait peut-être laisser Lilith digérer tout ça avant d’ouvrir la bouche de nouveau.

La berlinoise n'était en rien du genre rabajoie, au contraire, la bourde du jeune homme lui apportait un certain amusement qu'elle tentait de dissimuler. Après tout, elle ne le connaissait et peut être que voir apparaître cette expression sur son visage le vexerait. Elle ne se moquait pas de lui non, ce n'était clairement pas le genre de la jolie blonde, simplement, elle prenait toujours les choses du bon côté, avec optimisme et apprécier certains petits aléas de la vie, comme elle pouvait s'amuser de ses propres "talents" de cuisinière. S'il savait que la demoiselle était parfaitement capable de rater ne serait-ce qu'un simple plat de pâtes, il serait sûrement beaucoup moins gêné pour ce café raté. Elle devinait chez le garçon un côté maladroit au premier abord, mais elle ne se permettrait de le juger immédiatement, peut être était-il tout simplement mal réveillé. Lilith ne put pourtant s'empêcher de lancer une petite plaisanterie sur le sujet, histoire de détendre un peu l'atmosphère. Elle pourrait se passer de café, ayant de plus déjà pris le sien au petit déjeuner. Elle ria doucement de la petite anecdote de son interlocuteur, aucunement contrarié par son amusement. Oui certainement quelque peu dissipé et maladroit ce garçon. L'européenne se contenterait donc d'un verre d'eau, faute de café.

Ainsi, l'anglophone répondait au nom d'Oliver et celui-ci ne mit pas longtemps à remarquer le tatouage ornant l'avant bras de la jeune femme. Tout naturellement, elle acquiesça, lâchant sa main afin de lui montrer la clé de sol reposant depuis maintenant quelques années sur sa nuque. Le dos tourné, elle esquissa un sourire en entendant la réaction de son hôte. Le moment était venu pour elle de se présenter à son tour, la moindre des politesses. Elle ferait l'impasse sur le vouvoiement, jaugeant l'âge similaire qu'ils devaient avoir tous deux. La belle ne se voyait de toute façon pas vouvoyer son colocataire au quotidien si celui-ci acceptait de l'accueillir dans son appartement. Et puis, elle n'était pas non à un entretien d'embauche, le cadre était beaucoup plus détendu.

Lilith laissa Oliver préparer un plateau comportant une carafe et deux verres avant de reprendre la parole, engageant légèrement le sujet musique, juste histoire de montrer leurs gouts similaires et sa connaissance d'anciennes musiques. Il faut dire que la jeune femme avait baigné là dedans, le casque sur les oreilles pour oublier cette vie teintée de misères. Oh, elle ne se plaignait pas, jamais même, mais disons qu'elle avait tout de même dû trouver une échappatoire, un moyen de se vider la tête. C'était donc régulièrement qu'elle se réfugiait dans la musique tout en grisant le papier de grain, se laissant aller à son imagination. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire à l'affirmation du jeune homme, mais elle savait qu'il était temps pour elle de révéler sa situation précaire, aussi temporaire serait-elle. Immédiatement, elle enchaina tout de même sur ses projets pour prouver son ambition au jeune homme. Elle ne lâcherait pas ses rêves ... Jamais ...

Dans son élan, Lilith ne remarqua pas cette lueur illuminant soudainement le regard de son interlocuteur, enchainant sur la question du loyer qui n'était pas abordée dans l'annonce que ce dernier avait posté, elle ne comprenait pas pourquoi d'ailleurs. Serait-ce à la tête de la personne ? Ou selon le revenu de celle-ci ? Elle verrait bien. Le bond soudain d'Oliver la fit sursauter et écarquiller les yeux, ne comprenant pas réellement quelle mouche l'avait piquée. Ce garçon était étrange et imprévisible, mais d'un côté, ne l'était-elle pas elle-même ? Les questions s'enchainèrent et la demoiselle se mit à sourire lorsqu'elle comprit quel était le sujet de discussion actuelle, soit sa profession, ou son ancienne profession pour le moment. L'anglophone semblait drôlement s'y connaitre, rares étaient ceux pouvant évoquer un style en particulier. Elle ouvrit la bouche pour répondre, mais se ravisa lorsqu'il poussa un juron en évoquant une certaine colocataire tatoueuse. Avait-elle manqué un épisode ? La partie était déjà gagné ?

Pour la seconde fois, elle ouvrit la bouche pour s'exprimer, mais sans succès, le fanatique de l'encre noire se précipitait déjà vers une autre pièce qu'elle devinait être sa chambre afin de lui montrer d'après ses mots "un chef d'œuvre d'un artiste local". Elle était bien loin de s'attendre à une telle réaction de la part de l'annonceur. Ainsi, il lui avoua sans certainement s'en rendre compte qu'il n'avait pas encore trouvé le courage de se faire tatouer. Lilith savait bien que ceci n'était pas anodin et en tant que professionnelle, elle conseillait régulièrement aux personnes de présentant à elle de bien réfléchir avant de passer à l'acte, l'encre noire étant indélébile, gravée sur la peau à jamais. Beaucoup d'adolescents ou de jeunes adultes se lançaient dans des œuvres qu'ils regrettaient certainement un jour ou l'autre.

De son côté, Lilith n'avait encore jamais regretté l'un des siens, puisque pour elle, chacun d'eux avait une signification, quelque chose qu'il lui tenait à coeur ou un symbole rappelant certains évènements de sa vie. Celui auquel la jeune femme tenait le plus était sans doute le phoenix trônant sur sa cuisse, bien caché au regard des autres malgré son style vestimentaire l'amenant à porter beaucoup de jupes courtes. Elle revint à la réalité lorsqu'Oliver lui mit sous le nez un cadre contenant un dessin aux détails bluffants. Captivée par ce coup de crayon, elle tendit la main vers le cadre, demandant tout de même la permission de s'en emparer. "Je peux ? ..." Lorsqu'elle eut l'affirmation de son propriétaire, elle le saisit délicatement et l'emporta sur ses genoux pour mieux l'examiner. Malgré le fai que celui-ci était protégé d'une vitre, Lilith traça certains contours du végétal de son ongle verni de noir. Elle écouta distraitement les commentaires d'Oliver et finit par relever son regard d'océan sur lui. "J'en pense que ce gars est drôlement doué. C'est juste bluffant, j'ai rarement vu une fleur dessinée avec autant de détails, ton ami a de quoi être fier, il a beaucoup de talent." dit -elle en lui rendant l'encadrement.

En tant qu'artiste, la berlinoise savait apprécier le travail d'autrui quand il le méritait et elle était sincère dans ses propos. Bien sûr, elle serait parfaitement capable de reproduire cette oeuvre sur l'épiderme de qui voudrait, il ne lui suffirait que de suivre les tracés de son auteur. Dans sa contemplation, elle en avait oublié de répondre aux questions du jeune homme et décida d'éclairer celui-ci sur son propre style.

"Pour répondre à tes questions, j'essaie de m'adapter à tous les styles selon l'envie du client, je trouve ça intéressant de s'essayer à tout. Enfin, concernant le biomécanique, je ne suis pas spécialement fan, mais comme on dit, chacun ses gouts ... Je propose aussi des planches de motifs de ma propre création, je te montrerais à l'occasion."

Après lui avoir donné quelques détails sur ses propres goûts, la blonde décida de se reporter sur lui, notamment sur le sujet de la musique, elle voulait savoir s'il s'y connaissait vraiment et si leurs préférences musicales s'accorderaient bien entre elles, bien qu'elle se doutait déjà de sa réponse. Pourtant, rapidement, elle se rendit compte qu'elle faisait perdre son temps au jeune homme,  mais celui-ci n'y prêta aucune attention, bien au contraire, il lui cita donc les principaux groupes dont il était fan, tout à fait ce que la belle avait dans sa playlist, mais également des groupes amateurs dont elle n'avait certainement pas connaissance qui attirèrent son attention.

"Des groupes amateurs ? Je serais curieuse d'écouter ça, peut-être que tu me feras découvrir la perle rare en terme de musique ? J'ai moi-même fait parti d'un groupe à l'époque, enfin je chantais dans les bars à Berlin, histoire de me faire un peu d'argent."

Réellement assoiffée, Lilith se permit d'attraper le verre propre restant afin de se servir un peu d'eau, le portant ensuite à ses lèvres pour en boire une gorgée. Rencontrer Oliver, un jeune homme plutôt mignon qui aimait les tatouages et la musique, la belle blonde semblait avoir toutes les clés en mains pour passer une bonne journée et se faire un nouvel ami si possible. Bien entendu, elle savait bien que son manque d'argent lui porterait certainement préjudice et elle attendait patiemment que son interlocuteur relance le sujet, s'excusant certainement de ne pas pouvoir donner suite à la requête de colocation de la jeune femme.

De toute façon, ce ne serait pas le premier refus qu'elle essuirait ou le premier rejet qu'elle subirait. Elle n'en avait que trop l'habitude, mais comme toujours, elle ne se démonterait pas. Elle remontrait majestueusement en selle après sa chute, puis que la tatoueuse n'abandonnait jamais. Certes, l'appartement et l'hôte étaient tous les deux très sympathiques, mais il devait y avoir nombre d'annonces sur cette île, de nouveaux débarqués comme elle, cherchant un point de chute. Non, elle ne se découragerait pas et même, proposerait sans doute à Oliver de garder contact, elle ne pourrait pas lui en vouloir. Mais pourtant, ce fut à son tour à lui d'être honnête et il lui conta les raisons de cette annonce. Simplement pour faire des rencontres ... Lui aussi se sentait si seul ? Elle ne pouvait que le comprendre, elle connaissait si bien la solitude elle aussi, le rejet ...

Malgré une certaine richesse de son paternel, Oliver semblait avoir ses projets, vouloir se débrouiller par ses propres moyens, ce qui était tout à fait honorable. Il n'étaita pas comme ces gosses de riche pensant que tout leur était servi sur un plateau d'argent. Lilith n'avait jamais eu la vie facile, mais clairement, elle préférait cela plutôt qu'être née avec une cuillère en argent dans la bouche comme l'on disait. Elle ne voulait ressembler à ce garçon qu'elle avait blessé par accident. Pourtant au fond d'elle, malgrè le fait que la demoiselle ne contenait aucune once de méchanceté en elle, il l'avait mérité. Pour une fois, le faible avait vaincu le fort dans cette histoire, même si l'incident lui avait vallu un séjour en maison de correction et une réputation de délinquante par la suite. Ce n'était pas plus mal tout compte fait ? Pas de famille, pas d'attache, de quoi vouloir constuire une nouvelle vie sur cette île de magie. Là où tous pouvaient user de leurs pouvoirs sans crainte, sans reproche.

La conclusion de l'américain laissa Lilith bouche bée. Ne pas payer de loyer ? A conditions qu'ils accrochent ? Si elle n'avait pas ce petit grain de folie en elle, elle pourrait l'accuser d'en avoir un aussi. C'était peut être le cas ? "Tu plaisantes ? Je ne peux pas accepter, c'est hors de question ... Dès que je trouve un job, je payes une part de loyer, c'est non négociable." Parce qu'elle ne voulait rien devoir à personne, tout simplement. Pourtant, elle fut encore plus abasourdie par les paroles qui suivèrent, n'y croyant pas ses oreilles. Non seulement, il lui proposait d'habiter ici sans charge, mais en plus, il lui offrait un local pour exercer son activité professionnelle ? Avec déjà des projets de travaux en tête qui plus est. Désarçonnée, elle posa son verre en déglutissant.

"Je ... Je suis touchée par ta proposition, c'est vraiment généreux mais ... te rends-tu bien compte de ce que tu proposes ? Tu me connais à peine, je pourrais très bien être malhonnête ..." Elle marqua une pause, gardant tout de même un temps de réflexion avant de le fixer avec sérieux. "Ok ... Je serais vraiment folle de refuser ça en fait. Si tu me fais réellement confiance, d'accord ... Associés ... Tu es vraiment sûr de toi ?" Soudainement, tout en regardant le jeune homme au regard d'azur, elle se mit à sourire.

"Bien que cette serviette s'accorde drôlement bien avec la couleur de tes yeux, je pense que tu peux la retirer maintenant." lui dit-elle avec un ton taquin. Ce détail l'avait certainement travaillée depuis son arrivée, mais elle n'avait voulu mettre Oliver dans l'embarras. Peut-être apprécierait-il qu'elle le lui ai dit ? Ou pas ... Puis elle reprit rapidement son sérieux. "Admettons que ce projet prenne vraiment forme, que dis-tu d'être mon premier client ? Je suis prête à tatouer cette fameuse rose sur ta main, qu'en penses-tu ?"

L'Américain n'avait pas hésité à proposer des solutions pour venir en aide à l'allemande, nationalité qu'il pensait avoir reconnu avec de son accent prononcé (en bon fanboy de l'histoire des deux guerres mondiales il avait du travailler sur des reportages de l'époque en allemand et avait donc quelques bases). Alors que le blondinet s'était promis de ne plus agir de la sorte, une étrange force intérieure l'avait persuadé du contraire ! Un peu comme Jimi Hendrix qui a brulé sa guitare sur scène lors d'un concert ! Un vrai moment d'émotion et de légende dans la culture musicale mondiale ! Bon d'accord, Oli n'était pas sur scène, n'était pas une star mondiale mais cette fille avait l'air gentille et dans le besoin alors pourquoi pas ? Puis d'un coté le blond ne voulait plus se retrouver seul.

Par contre Lilith semblait hésiter, rien de plus normal d'un côté si l'Allemande était une inconnue pour l'Américain l'inverse l'était tout autant. Oliver se dit qu'il n'avait pas été bien malin sur ce coup car il venait peut-être d'effrayer la seule colocataire potentielle qu'il avait rencontré.

"J'insiste ! On a qu'à dire que ta participation aux taches ménagères sera une partie de loyer ? Qu'en penses-tu ?" Loin de lui d'être un de ces hommes machistes qui pensait que la place des femmes étaient à la maison derrière les fourneaux, c'est juste que vivant dans le luxe, Oliver n'avait jamais à s'en inquiéter jusqu'à présent et un peu d'aide serait la bienvenue. Il ajouta : "Euh ne le prend pas mal, c'est juste que je ne suis pas très débrouillard pour être honnête, ne crois pas que je prends part à un quelconque mouvement machiste !" Maintenant il avait sa conscience tranquille grâce à ces quelques précisions.

L'Allemande demanda alors si Oliver était vraiment certain de sa proposition, ce à quoi il répondu le plus naturellement du monde en haussant les épaules : "Ben oui, sinon je ne te l'aurais pas proposé, notre présence ici... c'est l'occasion de tout redémarrer à zéro et tu m'as l'air sympathique et je passe sur les points communs que nous partageons alors... autant se lancer !" Un sourire de satisfaction apparut sur son visage. Oui il avait beau se triturer les méninges c'était une bonne idée, au fond de lui il le savait.

Ses joues se tintèrent légèrement d'une nuance pourpre lorsque la belle lui rappela qu'il avait toujours une serviette sur la tête ! Encore une fois sa crédibilité en prenait encore un coup, d'un geste vif mais néanmoins désordonné Oli s'empara de la serviette avant de la jeter derrière le fauteuil. Le blondinet la ramasserait plus tard, pour l'instant il devait finaliser les détails avec Lilith. "Désolé, le stress sans doute depuis que j'ai reçu ton message pour la visite je n'arrête pas d'y penser.... curieux pour quelqu'un qui n'a pas besoin de colocataire n'est-ce pas ?" Oliver souriait naturellement, il avait la curieuse sensation qu'il n'aurait pas besoin de s'inventer un personnage en compagnie de la charmante jeune femme. Par contre, le jeune homme si joyeux et bavard se figea quelques instants lorsque l'Allemande lui proposa d'être son premier client. Jamais il n'avait osé franchir le pas et en l'état actuel des choses il ne s'en sentait toujours pas capable. Mais comment s'en sortir sans offusquer Lilith ? Si jamais il venait à refuser elle ne prendrait sans doute pas l'appartement. Oli devait la jouer finement si il voulait avoir un espoir de convaincre la belle. Il se redressa lançant juste "Oui pourquoi pas mais avant que dirais-tu de visiter l'appartement ? J'imagine que tu as des questions ?"

L'américain avait à pein terminé que déjà il tournait au coin de la cuisine se dirigeant vers les chambres pour les montrer à l'Allemande. "Alors ici c'est ma chambre et juste en face la tienne... enfin si tu es d'accord..." Oliver commençait déjà à s'imaginer en compagnie de la blonde et il ne devait pas trop s'avancer, il n'était pas à l'abris d'un retournement de situation.

Plissant les yeux, Oli se retourna pour voir si l'Allemande l'avait suivi.

Le courant semblait bien passer entre les deux jeunes gens qui commençaient déjà à faire connaissance à travers leurs passions communes. Lilith était tout de même étonnée d'être par hasard tombée sur un fan de musique et de tatouages tout comme elle. Mais elle n'allait guère s'en plaindre, bien au contraire, pouvoir partager sur ce qu'elle aime par dessous tout n'allait en rien déplaire à la belle. De plus, Oliver, lui semblait relativement sympathique et celui-ci était déjà parvenu à lui arracher quelques sourires amusés.

L'européenne avait bien l'intention de régler cette histoire de loyer, car il était hors de question qu'en quelque sorte, elle vive au crochet d'un inconnu, cela allait contre ses principes. Bien qu'elle n'avait jamais eu de famille, elle savait bien se tenir et était devenu quelqu'un d'honnête. Mais alors qu'elle réfutait totalement les dires de l'américain, la tatoueuse resta légèrement interdite devant cette réponse, somme toute étrange et tout de même machiste. La surprise dut se lire sur son visage puisque le garçon semblait vouloir se rattraper, expliquant les réponses de sa proposition. Finalement, la belle lui sourit, comprenant que celui-ci avait certainement une vie dont tout le monde rêvait, mais sans que cela ne lui rende réellement service.

"Oh je vois ... Et bien je suis d'accord le temps que trouve une source de revenus, mais par la suite, il va falloir que tu apprennes. Les tâches ménagères, c'est loin d'être compliqué !"

Elle agrémenta cette fin de phrase par un clin d'oeil complice. Mais bien au-delà de la sympathie, le jeune homme, de condition apparemment aisée, venait de lui proposer ce que l'allemande souhaitait plus que tout : ouvrir son propre salon de tatouage sur cette île nouvelle. Jamais elle n'aurait pensé que cela aurait été si facile ... Mais la droiture de la demoiselle à la crinière des blés prit rapidement le dessus, le sommant de réfléchir à cette proposition. Elle ne voulait pas profiter de lui, elle n'était pas ce genre de femme à prendre les hommes pour des pigeons. A vrai dire, la berlinoise avait beaucoup de mal à comprendre ce jeune homme, mais ce dont elle se doutait, c'était une solitude apparente. Certaines personnes avaient besoin de la présence d'autrui pour exister. C'était bien loin d'être le cas de la belle blonde qui avait appris à se débrouiller seule durant cette vie de galère.

Oliver semblait tout à fait sûre de lui. Et puis, il n'avait pas tort sur le fait que cet endroit leur offrait une nouvelle vie, ce dernier semblant avoir le même point de vue que sa future colocataire. Ses doigts aux ongles soignés et vernis pianotèrent nerveusement sur sa jambe découverte durant sa réflexion. Au final, comment pourrait-elle refuser si cela lui faisait plaisir ?

"Très bien, marché conclu alors !"

Par la suite, la jeune femme ne put se retenir de prévenir le pauvre garçon qu'il avait oublié sa serviette éponge sur la tête. Non pas qu'elle le trouvait ridicule ainsi, mais cela l'amusait à quel point le jeune homme semblait turbulent. Lilith ne manqua guère de le taquiner là dessus, espérant qu'il ne le prendrait pas mal car c'était l'un de ses traits de caractère principaux. De nouveau, elle dut se mordre la lèvre pour ne pas pouffer de rire devant sa réaction alors que ses joues se paraient de rouge. Honnêtement, elle trouva cela particulièrement mignon mais s'abstint de le mentionner, bien qu'elle en soit parfaitement capable. L'allemande appréçiait cette fraicheur et cette innocence qu'Oliver dégageait, il ne ressemblait pas à ce gosse de riches que la vie lui avait permise de croiser. Elle s'en serait bien passé ...

La serviette valsa, dévoilant sa chevelure des blés, s'accordant parfaitement avec son regard d'azur. Le stress du jeune homme était palpable, même si l'européenne ne se savait pas si déstabilisante. Elle avait l'habitude de certains comportements étranges chez les hommes mais cette fois-ci, c'était plutôt différent. Mais dans le but de le rassurer, un sourire toujours affiché sur ses lèvres rosées, la belle hocha négativement de la tête en guise de réponse.

Puis une idée lui vint à l'esprit, repensant à cette rose que le blond lui avait montré plus tôt. Pour le remercier, elle lui proposait naturellement d'être son premier client, ravie de pouvoir lui rendre service. L'expression figée de l'américain n'échappa guère à la blonde qui comprit qu'elle n'aurait pas dû aborder ce sujet. Loin d'être idiote, Lilith sentit venir à des kilomètres cette tentative de diversion qu'Oliver tentait de mettre en place et par respect pour lui, elle se leva pour le suivre, se promettant de ne plus reparler de ce fameux tatouage. Veillant soigneusement à remettre sa jupe en place, elle passa par réflexe une main dans sa crinière dorée pour la remettre en place.

"C'est parti pour la visite !"

La berlinoise se hâta de rejoindre le blondinet qui avait déjà disparu dans une autre pièce, celui-ci lui indiquant les chambres. La douce se permit d'entrer dans celle qui lui était destinée, avançant jusqu'au milieu de celle-ci pour admirer la vue que les doubles vitraux lui offrait. L'ombre d'un instant, elle ferma les yeux pour apprécier la chaleur des rayons du soleil sur sa peau de porcelaine avant de se retourner, toute sourire vers le propriétaire des lieux. Simplement, elle lui lança quelques mots.

"Je sais que la visite n'est pas terminée mais ... je prends !" Elle s'approcha un peu plus d'Oliver, l'air joyeux. "Cette pièce a beaucoup de potentiel, je pense que je m'y sentirais chez moi." Elle réfléchit un instant avant de sortir de sa chambre. "Enfin, j'aimerais tout de même voir tout l'appartement ..."

Soudainement, elle ressentit le besoin de partager un détail avec lui, soit l'un de ses plus grands défauts : son talent déplorable pour la cuisine. Si douée pour dessiner, l'art de la cuisine était bien loin de lui avoir révélé tous ses secrets, chacune de ses tentatives se vouant d'avance à l'échec. Un peu gênée, les joues légèrement rosissantes, elle se décida à  le lui dire.

"Par contre, Oli ..." Car oui, Lilith se permettait déjà de l'appeler par un diminutif. "Ne comptes pas sur moi pour faire la cuisine parce que ... je suis tout simplement une catastrophe ambulante pour être honnête. Je ne tiens pas à ce que tu te retrouves avec une intoxication alimentaire par ma faute." La belle émit un léger rire cristallin pour se détendre. "Tu vois, moi aussi, j'ai quelques défauts !"

Les deux jeunes gens n’étaient vraisemblablement pas sur la même longueur d’onde concernant les taches ménagèrent, un léger quiproquo s’étant installé.

« Ah non non non, tu as dû mal me comprendre, je ne veux pas que tu assumes toute seule les tâches ménagères, je ne suis pas de ces esclavagistes nord-américains. Je voulais juste un coup de main. Jamais je ne me permettrai de t’imposer quoi que ce soit. » Malgré la réponse de Lilith et sa contre-réponse, Oliver avait sincèrement peur que la blonde prenne la mouche suite à cette demande que l’on pourrait classer de maladroite. Le natif de Seattle voulait simplement que les taches soient bien réparties et pourquoi pas les faire ensembles. Comme on dit deux mains valent mieux qu’une ! Par exemple durant ses années de pensionnat le jeune garçon s’était tapé les corvées de ses compagnons de chambré sans rien dire mais aujourd’hui nouvelle vie voulait également dire nouvelle résolution.

Oli avait par la suite répondu aux quelques interrogations de la demoiselle concernant sa proposition de partenariat au sujet du salon de tatouage. Le jeune homme voulait vraiment aider cette fille à se lancer dans la vie active, non pas qu’il voulait endosser le rôle d’un quelconque messie mais vu qu’il avait les moyens financiers et matériels… autant rendre service ! Lilith était charmante, gentille et a priori, loin d’être bête, bien sûr l’étudiant en histoire n’avait pas encore eu le loisir de voir beaucoup de créations de la belle allemande mais à ce moment-là c’était vraiment le cadet de ses soucis. Lorsque la tatoueuse dit ces quelques mots, Oliver était aux anges, il venait de trouver une colocataire et associée, alors pourquoi pas une nouvelle amie ? La nouvelle vie du jeune Hiroven commençait doucement à se dessiner comme cette rose sur le carnet de son ami Johan…

Par la suite ce fut la gêne qui prédomina sur l’excitation d’avoir trouvé une colocataire, cet idiot de mélomane avait oublié la serviette entourant sa crinière blonde ! Comment perdre de sa crédibilité à la vitesse de la lumière ! Heureusement après quelques excuses et explications, Lilith ne s’en souciait guère, elle semblait s’en amuser même, très bonne chose ! Par contre, Oliver se ferma comme une huitre lorsque sa colocataire évoqua son intention de le prendre comme premier client. Voilà un problème qu’Oli n’avait jamais imaginé à l’idée de vivre avec une tatoueuse. Forcément, sans surestime de soi, sa peau vierge de toute marque serait le tableau idéal pour une artiste comme l’Allemande et les sollicitations seraient peut-être nombreuses à l’avenir. Mais devant l’urgence de la situation, Oliver avait décidé d’adopter une défense qui a fait ses preuves de nombreuses fois dans l’histoire : La Fuite ! D’un bond il se leva bredouillant qu’il fallait que Lilith voit l’appartement plus en détail. Il montrant ainsi les deux uniques chambres de l’appartement, celle de Lilith vide de tout ameublement et la sienne. Oliver n’était dedans depuis pas très longtemps et pourtant il y avait déjà un bordel monstre dans sa chambre. Heureusement, il eut le bon réflexe et ne montrait que le bord de la pièce. Cette dernière était la chambre la plus grande et l’Allemande ne put apercevoir qu’un bureau avec un ordinateur et des bibliothèques remplis de livres et CD à l’arrière. Puis ce fut au tour de la chambre de Lilith, la blonde si voyait déjà tandis qu’un sourire se dessinait sur les lèvres de l’américain.

« C’est vrai, la chambre te plait ? Bien sûr je n’ai pas eu le temps de le meubler tu m’excuseras mais d’un côté ce n’est pas plus mal, tu seras libre de choisir tes meubles. Et surtout ne t’en fais pas, l’annonce stipulait que l’appartement serait intégralement meublé donc à ma charge ! »

Oli voulait simplement être honnête, il l’avait dit dans l’annonce et il le ferait ! Bien que jeune, il était un homme de parole et il ferait de son mieux pour que sa colocataire se sente comme chez elle. Bien qu’elle était certaine de prendre la place de colocataire disponible, Lilith demanda légitimement de voir le reste de l’appartement ce qu’Oliver s’employa à faire le mieux possible mais avant  elle fit une drole de confession. Oli avait vraiment dû merder avec les tâches ménagères car Lilith se sentit obligée de lui avouer qu’elle ne savait pas faire la cuisine, il répondit simplement par un haussement d’épaule et un clin d’œil. « C’est impossible, c’est moi le pire cuisinier du monde ! » Puis il ajouta concernant la suite de la visite éclipsant d’une manière bizarre le sujet des repas :

« Aucun souci, par contre comme tu t’en doute je ne suis pas agent immobilier donc je ne connais pas les termes techniques j’espère que ça t’ira. » Un simple sourire pour terminer sa phrase et Oliver continua la visite montrant la salle de bain, quelques placards avant de revenir vers la cuisine, la salle/salon et pour terminer la pièce vacante qui serait idéale pour accueillir la salle de travail de la jeune femme. « Comme tu peux voir, la pièce a du potentiel. Ta table tu pourrais la poser ici, avoir un petit bureau dans le fond à droite et sans oublier une étagère dans ce coin là avec tes produits et matériaux… enfin après c’est toi qui vois, je ne veux pas m’immiscer dans tes affaires. » Oliver rougit de nouveau  ayant peur de trop s’emballer et d’empiéter le territoire de l’Allemande, chose qui n’était pas très bien perçue dans le monde de la vie en communauté.

Après quelques minutes où il laissait Lilith regarder les possibilités que lui offrait la pièce, Oli revint vers elle le sourire aux lèvres. Un peu plus tôt, elle lui avait parlé du fait qu’elle ne possédait aucun don culinaire et il avait juste répondu que lui aussi mais entre-temps l’étudiant venait d’avoir une idée brillante.  « Il se fait déjà tard, que dis-tu de déjeuner ensemble ? J’ai trouvé l’alternative idéale… la pizza ! » Son regard pétillait, Oliver étant vraiment dingue de ce plat aux origines italiennes, il espérait vraiment que la belle y serait également réceptive. Il ajouta par la suite : « Et après que dis-tu d’écumer les magasins pour ton mobilier ? J’ai également une excellente alternative… la carte de crédit ! »

En l'espace d'une heure, Oliver avait offert à Lilith les moyens de bien commencer sa nouvelle vie. Etait-ce le destin qui l'avait mise sur le chemin du jeune blonde, afin de lui offrir un peu de chance dans cette vie mouvementée ? Ou était-ce simplement le hasard ? Un logement, un travail et certainement un ami en perspective. L'américain lui proposait ces trois opportunités alors qu'il ne la connaissait que depuis peu. La belle avait vu dans ce regard que celui-ci n'avait aucune arrière-pensée à son sujet. Il aurait pu, il était un homme, et beaucoup d'hommes seraient prêts à se mettre en quatre juste pour une nuit avec l'allemande. Mais ce n'était ce qu'elle voulait et ce n'était pas ce qu'il voulait non plus. Tous deux avait juste besoin d'une compagnie, d'un ami. C'était donc cela qui hantait l'esprit de la berlinoise alors que celle-ci contemplait la vue que lui offrait sa future chambre, alors que les rayons du soleil faisaient briller un peu plus sa crinière des blés. Une nouvelle vie ...

Ce fut avec un sourire flottant sur ses lèvres et le regard d'océan brillant que Lilith revint vers le blondinet, acceptant sans réelle cérémonie cette collocation. La douce savait qu'elle se sentirait bien en ces lieux spatieux et lumineux, bien mieux que ce qu'elle avait pu avoir durant toute sa vie, hormis cette courte période d'adoption. Mais ce souvenir, elle l'avait occulté pour ne pas entâcher son optimiste. La jeune femme ne cherchait absolument pas à cacher son enthousiasme vis à vis de l'appartement, bien qu'elle réclama tout de même la suite de la visite, certaine de ne pas être déçue de celle-ci. L'européenne resta légèrement bouche bée lorsqu'Oli l'informa qu'elle pourrait choisir ses meubles et ce, sans dépenser un rond. Elle ne protesta guère, admettant qu'en effet, l'annonce stipulait un appartement meublé. Tout de même, elle se sentit le besoin de le remercier.

"D'accord ... De toute façon, je suppose que tu n'accepterais aucun refus ! Merci Oli ..."

Sans détour, la demoiselle à la chevelure des blés finit par lui avouer ce qui était sans doute son plus grand défaut. Oui, bien que la belle soit douée dans plusieurs domaines, elle ne l'était absolument pas en cuisine. En quelque sorte, elle avait honte de son incompétence, ce qui expliqua la légère couleur rosée s'emparant de ses joues. C'était comme si l'allemande attendait un quelconque jugement de la part de son interlocuteur, mais elle ne put s'empêcher de laisser échapper un rire cristallin à la réponse de celui-ci.

"Et bien, je pense que l'on peut commencer à instaurer une cagnotte pour le traiteur ! On va éviter de voir qui de nous deux est le plus mauvais en cuisine !"

A son tour, la belle lui fit un clin d'oeil, son côté taquin l'emporta peu à peu. Elle acquiesça d'un simple sourire angélique les mots suivants de son futur colocataire. Comme la blonde le pensait, l'endroit était parfait pour elle et la pièce qu'il lui présenta pour son salon l'était également. Elle écouta Oli avec attention, un sourire amusé aux lèvres en apercevant les rougeurs de son visage. Doucement, elle posa une main sur son épaule pour le rassurer.

"Je vois que mon projet semble t'inspirer ! Et en tant qu'associé, tu as bien le droit de donner ton avis tu sais." Elle scruta la pièce de son regard azur avant de le plonger de nouveau dans les iris bleutés du jeune homme. "Et tu as le sens du gout, j'imagine cette pièce telle que tu l'as décrite."

Mais Lilith resta quelques instants plantée dans la pièce, presque déjà émerveillée à l'idée de pouvoir en faire son lieu de travail. Si proche de son lieu de vie, c'était plutôt l'endroit rêvé. L'américain vint l'arracher à ses pensées en lui proposant de déjeuner avec lui. Rayonnante, elle lui répondit sans hésitation. "Une pizza ? Oui ! J'adore les pizzas ! C'est d'accord pour le déjeuner." La belle ne put louper ce regard pétillant qu'elle perçut immédiatement chez le blondinet. "Encore un point commun très cher ..." Cerise sur le gâteau, le garçon lui proposa ensuite de faire du shopping, ce qui la fit frémir un peu plus d'impatience.

"Oui très bonne idée ! Enfin si tu as des choses prévues, on peut faire ça une autre fois !" Lilith se mordilla légèrement la lèvre, hésitant un instant à lancer une taquinerie à son nouvel ami. Après tout, il devait connaitre ce principal trait de caractère chez elle. "Tu sais que tu aurais tout d'un petit ami parfait toi ? Déjeuner et shopping, tout ce que les femmes aiment !" Pouffant un peu de rire, elle observa le jeune homme aux pupilles d'océan. "Je suis désolée, je suis très taquine, il va falloir t'y habituer mais ... si ça te gêne, n'hésites pas à me le dire."

Quelque peu inquiète d'avoir beaucoup trop gêné son colocataire, la blonde changea rapidement de sujet, son estomac vide n'allait guère tarder à se faire entendre, ce qui serait plutôt inconvenant en cette première rencontre. "Oli, tu as des adresses pour une bonne pizza ? On va en ville ou on commande ? Et c'est moi qui invite ok ?"

Avoir une nouvelle vie ? Partir pour tout recommencer par la suite ? Oui Oliver y avait déjà pensé pour être honnête mais jamais il n’aurait sauté le pas ! C’était un peu comme le fait de se faire tatouer. L’américain savait exactement le nombre de tatouages, le modèle et l’emplacement mais il avait toujours trouvé une bonne excuse pour ne pas passer sous le dermographe. Et là le jeune homme avait l’occasion de recommencer sa vie à zéro, de faire sortir les mauvaises choses et d’en faire rentrer de bonnes. Comme cette Lilith… l’Allemande avait un petit truc en elle qui inspirait de la confiance au blondinet, il avait su dès le premier coup d’œil qu’il pourrait lui faire confiance.  Alors Oli se laissa porter par une petite touche de folie, petite touche qui l’incita à proposer l’appartement alors que Lilith n’avait rien pour payer, petite touche qui l’incita à s’associer à l’Allemande. Mais après tout qu’était-ce la vie sans un petit brin de folie ? Et cette relation de colocation qui allait débuté en était le parfait exemple. A n’en pas douter l’Allemande était définitivement la première pierre du nouvel édifice de sa nouvelle vie !

Heureusement, Lilith ne le contredit pas lorsqu’Oliver lui proposa de choisir les meubles qui composeraient le mobilier de sa chambre. Le natif de Seattle y tenait vraiment et en plus comme c’était dans le contrat de colocation il avait une obligation contractuelle envers sa futur colocataire ! Il espérait tout de même, même si il n’en doutait pas que la blonde n’était pas du genre à prendre du mobilier style barbie, cela contrasterait beaucoup avec le reste du mobilier de l’appartement mais bon chacun ses gouts ! L’étudiant gardait ses interrogations secrètes, il verrait bien en tant voulu le style de son amie potentielle, tant que ce n’est pas trop « kawaiiii » comme dirait l’autre ça sera bon. Lilith aborda le sujet d’une cagnotte pour les repas, idée pas bête du tout ! Ainsi aucun des deux n’auraient besoin de cuisiner et avec un peu de chance ils pourraient trouver un traiteur capable de livrer à domicile. Il acquiesça :

« Hum… bonne idée. J’approuve bien qu’il faudra faire attention niveau malbouffe, j’ai tendance à prendre du poids quand je ne fais pas attention et je tiens à garder mes tee-shirts Depeche Mode. » Il pouffa de rire devant le ton qu’il avait lui-même employé tentant de prendre un accent très léger pour surjouer la comédie. Mais ce que la belle ignorait sans doute c’est qu’il y avait une part de vérité dans les paroles d’Oliver… il avait bien des tee-shirts de ce groupe !  

Vint ensuite la découverte du potentiel atelier de Lilith et là encore Oliver succomba à l’excitation du moment imaginant une multitude de possibilité concernant l’agencement de la pièce avant de s’excuser et de laisser l’artiste s’occuper elle-même de la pièce. Lilith ne semblait pas s’être offusquée de l’envahissement de l’espace par Oliver, au contraire elle lui dit naturellement qu’en qualité d’associé il avait parfaitement son mot à dire. « Merci mais non, c’est toi l’artiste. A l’avenir si je vais trop loin n’hésites pas à me remettre à ma place, c’est important pour une colocation mais encore plus dans le cadre d’une association professionnelle. » Oli tenait ça de son père, plusieurs fois son paternel n’avait pas hésité à recadrer ses partenaires et le jeune homme supposait que c’était une des clefs de sa réussite insolente dans le monde des affaires. Il ajouta : «On m’a déjà fait la remarque pour mon gout, a priori, ça viendrait de ma mère mais bon… » Le garçon n’ajouta rien de plus, parler de sa mère même s’il ne l’avait jamais connu était assez difficile pour lui.

Par la suite, Oli laissa un peu de temps à la demoiselle pour qu’elle puisse se sentir un peu plus chez elle puis après quelques minutes il revint vers lui proposant une délicieuse pizza. Et là coup de grâce, elle adorait ça ! Tout comme lui ! « Mais tu es vraiment la colocataire idéale ma parole ! Sympa, tatoueuse, chanteuse…. Avoues tu es un robot ! Ce n’est pas possible autrement. » Aucunement il voulait flatter l’égo de la jeune femme mais elle avait pas mal de similitude avec lui, le blondinet oserait presque parler de femme idéale au lieu de colocataire….

Mais Lilith semblait penser la même chose de lui puisqu’elle n’hésita pas à balancer une petite boutade précisant qu’il serait le petit ami parfait. Instantanément, le visage de l’Américano-Finlandais se teinta d’une nuance très prononcée de rose. D’une nature très timide, Oliver était facilement impressionnable et le mettre en boite était chose aisée lorsqu’on savait le manier. « Ce n’est rien, ça ne me dérange pas… » Balbutia-t-il tentant de parler le plus distinctement possible. Son facies reprit une couleur presque normale quand elle parla d’une bonne adresse pour des pizzas. S’il connaissait une excellente adresse ? Bien sûr que oui, la meilleure même ! Ce plat typique de la tradition italienne était à mettre au même niveau que la musique pour lui, la pizza c’est sacrée !

« Et comment que je connais une bonne adresse ! La meilleure ! Imagine une fine pate gonflante aussi douce et croustillante que celle d’une fajitas, au-dessus de la sauce tomate d’une fraicheur inégalable et au-dessus le fromage de ton choix avec toutes les garnitures possibles et imaginables ! Des tranches d’ananas, du chorizo, saucisse, jambon, lardon, de quoi te faire prendre des kilos simplement en y pensant ! » Oliver se stoppa reprenant son souffle et reprit : « Je te parie la prochaine corvée de vaisselle que tu deviendras très vite accroc ! » Secrètement il espérait ainsi piéger l’Allemande et éviter la prochaine vaisselle car il était improbable qu’elle n’apprécie pas ce met aussi délicieux que ceux de la pizzeria qu’il avait trouvé.

« Euh par contre c’est moi qui invite sinon pas d’appart… » Un clin d’œil en guise de ponctuation pour signifier le fait qu’il plaisantait et le duo se dirigea vers le salon. « Que dis-tu de sortir ? Ainsi on en profiterait pour voir pour les meubles ? Et éventuellement je ne suis pas très costaud mais si tu as des affaires à monter à l’appart je peux me rendre utile si tu le désires. » Sur de lui, le jeune homme imita en gonflant ses muscles comme un athlète bodybuildé aurait pu le faire.

Deux catastrophes en cuisine, les deux jeunes gens devraient trouver une solution de secours pour se nourrir. Soit la solution de facilité en commandant divers repas déjà préparés, soit tenter d'améliorer un minimum leurs talents culinaires. Mais en attendant, Lilith proposa une alternative, une cagnotte commune. Oliver ne semblait pas contre, plutôt friand de cette idée, y répondant par une petite plaisanterie qui fit sourire la belle, mentionnant un groupe qu'il semblait apprécier tout autant qu'elle. Réellement, jamais elle n'aurait pensé que dès la première annonce, elle trouverait un colocataire partageant les mêmes passions qu'elle. Sacré coïncidence.

De plus, celui-ci  semblait relativement inspiré par cette pièce qui deviendrait le lieu de travail de l'allemande et ses idées étaient plutôt bonnes. Lorsqu'il s'en excusa, la blonde l'assura qu'avoir son avis était bien loin de lui déplaire, ils étaient associés et chacun avait son mot à dire. Sa réponse l'interloqua, le blondinet lui prouvant cette maturité que l'on ne soupçonnait pas forcément au premier abord. Il semblait si jeune, mais ses paroles étaient si justes et si professionnelles. Paisiblement, la berlinoise acquiesça d'un signe de tête, observant avec un peu plus d'insistance son interlocuteur lorsqu'il évoqua sa mère. Rien que par son expression, elle le devina comme un sujet sensible et décida de ne pas aller plus loin dans celui-ci. L'empathie de la jeune femme lui permettait d'analyser et de comprendre plutôt rapidement les autres.

L'américain enchaina sur le fait de déjeuner ensemble, proposant un met de choix, presque au gout universel et Lilith ne put s'empêcher de cacher son enthousiasme. Elle pouffa de rire à sa répartie. "Quoi ? Un robot ? Tu as une sacrée imagination dis moi !" La belle allemande se permit une petite taquinerie à son encontre, bien que pourtant sincère qui eut pour effet immédiat de parer les joues du jeune homme d'un rose plutôt prononcé. Ainsi, elle y décela sa timidité. Aussi, l'européenne trouva bon de s'excuser, l'avertissant de son côté taquin. Les quelques mots balbutiés la firent sourire de niveau et elle décida de changer de sujet pour le soulager, le questionnant sur une quelconque adresse où ils pourraient trouver une excellente pizza.

La description qu'il lui fit de ces fameuses pizzas mit l'eau à la bouche de la jeune femme, c'était tentant, si tentant ! Ce qu'elle pouvait avoir faim ... Mais elle pouffa de rire au défi lancé par Oliver. "Hey ! Mais c'est de la triche ça ! J'imagine que tu es sûr de toi pour proposer un truc pareil ... Mais si je suis déçue tu seras de corvée pendant une semaine en ce qui te concerne !" Le blondinet poursuivit, insistant sur le fait d'inviter de lui-même. Après tout, la corvée vaisselle valait bien une pizza gratuite ? Un peu théâtralement, Lilith fit mine de réfléchir. "Hmm ... Je pense que ça peut se faire." Souriante, elle s'exclama un peu soudainement. "J'accepte !" Le suivant vers le salon, elle écouta attentivement son nouveau colocataire, riant en le voyant bander ses muscles.

"Excellente idée ! Tu connais un peu la ville, je n'ai pas vraiment eu le temps de l'explorer. Mais cet endroit a l'air fun ! De quoi se faire une nouvelle vie ! Je ne sais pas pourquoi nous sommes ici, mais je dois avouer que ça me plait !" Attrapant son sac  à main, elle se dirigea vers la porte, se tournant vers lui. "On y va, je commence à avoir légèrement faim ... D'entendre parler de pizza m'a mis l'eau à la bouche. Et puis si tu es d'accord, on pourrait profiter de cette journée pour apprendre à se connaitre en plus d'acheter des meubles ?"

La belle comptait bien faire d'Oliver son ami, car malgré le peu de temps qu'elle avait passé avec lui, elle l'appréciait beaucoup, lui qui semblait si simple et qui la regardait autrement que d'autres hommes qu'elle avait pu croiser.