You are the beauty, I'm the beast but... [PV Kaede]

Ce soir allait être ta soirée ! Sous le regard amusé de ta grande soeur tu t'étais préparé et avait mis les petits plats dans les grands. Une nouvelle coupe de cheveux rafraîchissante, de l'eau toilette à la mode. Concernant ta tenue vestimentaire tu avais préféré la jouer simple, une petite chemise en soie rouge/bordeau et un pantalon noir ainsi que des chaussures habillées. Honnêtement tu l'aimais bien ce nouveau look et cette fois tu n'avais pas besoin d'envoyer une photo à ta grande soeur puisqu'elle était là t'aidant même à te préparer pour cet évènement. 

Tu avais décidé de demander à ton amie, la belle et envoûtante Kaede si elle voulait bien sortir avec toi. Pas comme des amis mais comme un couple ! Tu avais tout prévu, tu avais même développé les photographies de vos shooting photos pour créer un book rien que pour elle. Ce cadeau lui ferait certainement plaisir d'autant plus qu'elle pourrait éventuellement s'en servir pour postuler dans des agences de mannequin si elle le désirait. Tu avais également dans la poche de ton jean une petite graine de rose rouge que tu ferais éclore pour lui offrir un magnifique bouquet. 

Un dernier regard à des tortues et à des oeufs qui étaient en train d'incuber et tu criais à l'attention de Tihana : "J'y vais grande soeur ! Souhaites moi bonne chance et... je t'aime fort." 

Fier comme un coq tu prenais la direction d'Amishawa et de l'appartement de la Rose. Elle n'était pas au courant de ta venue et tu espérais pleinement lui faire une agréable surprise. Prenant les transports en commun tu arrivais enfin devant son immeuble prêt à tout déchirer comme disait les jeunes de maintenant. Tu faisais néanmoins une pause appliquant tes fameux exercices de respiration pour calmer ton palpitant. Ce serait dommage de faire un malaise cardiaque à cause d'une trop grande excitation non ? 

Tu appuyais sur l'interphone de son appartement mais aucune réponse. La demoiselle ne devait pas être rentrée. Le hic c'était qu'il commençait sérieusement à pleuvoir et que tu avais son cadeau bien emballé dans ton sac. Hors de question de le voir abîmé et tu profitais qu'un des résidents n'entre dans l'immeuble pour te faufiler à ton tour. Une fois devant la porte de ton amie tu sonnais mais sans réponse comme tu pouvais t'y attendre. C'est alors que tu décidais de l'attendre bien sagement devant le seuil de sa porte.

Ce soir, tu as affreusement froid. Cette soirée que tu aurais dû passer avec tes coéquipiers et amis à fêter ton adhésion officielle à la 5ème division des pompiers d'Amishawa, tourne au cauchemar. Le soleil se couche, l'air se fait plus frais alors que tu arbores toujours ton équipement du jour. Il est sale, tâché de sang. Tu es là, devant l'entrée à l'Hôpital, l'observant comme s'il s'agissait de la bouche de l'enfer. Aaron et Claire y sont, mais pourtant tu ne trouves pas la force d'y entrer. La peur étreint ton coeur. Il faut dire que jusque là, tu es parvenue à éviter cet endroit angoissant pour toi. Oui, depuis ton accident, tu as pris soin de ne jamais remettre les pieds en ces lieux.

Le courage dont tu as fait preuve quelques heures auparavant semble t'avoir quittée alors que tu frissonnes comme un animal apeuré. Tu déglutis, te repassant les évènements de la journée. Ton capitaine est blessé à la jambe, Claire à la tête et toi, tu t'en es sortie indemne. L'accident compte trois morts, un cycliste et une famille entière traumatisée et un jeune homme soutiré de la carrosserie de sa voiture. Tu ne sais pas encore ce qu'il en est de tout ce petit monde. Ils sont tous là-bas. Reculant d'un pas, tu attrapes ton téléphone afini de chercher un contact : Claire. Tu tombes malheureusement sur le répondeur.

"Claire ? Je ... J'appelais pour prendre de vos nouvelles. J'espère que vous allez bien, le capitaine et toi. J'ai peur qu'Hanna m'en veuille de lui avoir raccroché au nez alors, je vais juste ... rentrer chez moi. On a réussi à sauver l'homme coincé dans sa voiture. Merci de m'avoir aidée ... Prends soin de toi."

Tu raccroches, honteuse de te défiler ainsi. Mais la journée a été bien trop éprouvante pour que tu affrontes une nouvelle épreuve difficile. Les souvenirs sont bien là. Ces flashs quant à cet accident duquel tu as été sauvée lorsque tu étais adolescente. Tu tournes les talons afin de rentrer chez toi. Tu prends le bus, la mine fatiguée et éteinte, ne te formalisant pas de ta tenue. Il est bien rare de te voir ainsi. A peine sortie du transport, la pluie te surprend. Tu n'as même pas le coeur de te protéger avec ta magie comme tu peux le faire habituellement. Tout ce que tu as envie, à cet instant, c'est d'une bonne douche et prendre Kyo dans tes bras pour te blottir contre lui toute la nuit.

L'averse a le mérite de te nettoyer ta peau de la plupart des tâches de sang et autres saletés. Tu ressens juste une gêne à la main. Une erraflure. Tu n'as rien senti jusque-là pourtant, sans doute à cause d'une poussée d'adrénaline. Il va falloir t'habituer à ce genre de situation. Car c'est bien cela qui t'attend tout le long de ta carrière. Les trois défunts sur la conscience, les blessures de tes coéquipiers, te tiraillent atrocement.

C'est trempée et frigorifiée que tu montes l'escalier pour rejoindre ton appartement. Lorsque tu es au bon étage, tu lèves un regard surpris. Tes pupilles humides indiquent que tu as versé quelques larmes malgré toi. Elles s'écarquillent en voyant ton ami devant la porte de ton logement.

"Castiel ? Tout va bien ?"

Tu sembles t'affoler bien qu'il semble aller bien, élégant comme il est. Il a sans doute une bonne nouvelle à t'annoncer. Tu te reprends tant bien que mal, t'approchant de lui tout en feignant ta joie de vivre habituelle ! Tu ne sais pas si le jeune blanc y croira mais tu essaies tout de même.

"Tu t'es mis sur ton 31, dis moi ! Tu as rencard ?"

L'attente avait été longue, une bonne heure ou deux d'après ton téléphone portable. Tu avais pensé appeler ton amie pour lui indiquer ta présence avant de te raviser. Faire le gros lourd, le mec trop insistant était déconseillé par frenchlover58 sur un forum de discussion alors tu allais patienter. Enfin la Rose pointait son jolie minois en ta direction semblant surprise de te voir ainsi. Te redressant pour paraître présentable tu faisais en sorte de lui offrir un beau sourire digne de la pub Colgate, là encore suite aux conseils trouvés sur internet. Tu voulais mettre toutes les chances de ton coté. Kaede te demande si tout allait bien ce à quoi tu répondis : "Parfaitement et toi ? Tu as l'air d'avoir passé une grosse journée, tu as les yeux tout rouge."

Tu laissais la jeune demoiselle s'approcher assez pour voir qu'elle semblait fatiguée. Pouvais-tu te permettre de lui faire ta déclaration ce soir de ce fait ? C'était maintenant ou jamais pour toi. Depuis de longs mois Kaede était la seule à ne pas te juger, te voir comme un véritable adulte et elle t'avait aidé. Elle avait même insinué que tu n'étais pas bête et moche ! Tu avais toutes tes chances et tu espérais vraiment qu'elle accepte ta proposition. Te voilà soulagé lorsque tu vois son habituelle joie de vivre et voilà que sa curiosité reprenait vite le dessus. Parfait tu allais pouvoir rebondir sur ses propos et te jeter à l'eau comme on dit !

"Un rencard ? Oui enfin non... je ne sais pas encore en fait." Tu inspiras lui donnant le l'album photo bien emballé dans un papier cadeau. "C'est pour toi, j'ai choisi les meilleures et concernant le rencard... j'aimerais que ce soit avec toi." Tu rougissais très rapidement avant de mettre une main dans ta poche et de sortir cette fameuse graine. En un instant elle germa pour former une magnifique rose rouge que tu présentais à la jeune femme. 

"Pour toi aussi." Pour le moment tout se passait très bien et tu ajoutais : "Je t'emmène où tu veux enfin si tu es d'accord bien sûr !"

Tu te demandes bien ce que ton ami fait là, un paquet à la main et habillé de la sorte. Ca lui allait bien cette chemise, la couleur faisait ressortir ses yeux. Tu ne tardes pas à reprendre du poil de la bête, même si pour cette fois, tu fais semblant. Tu as encore le coeur lourd concernant cet accident et les blessures de tes coéquipiers. D'ailleurs, Claire ne t'a pas rappelée sur le trajet, tu espères qu'elle n'est pas fâchée de ne pas être passée à l'Hôpital. Heureusement, Castiel n'associe pas les rougeurs de tes yeux à la tristesse, mais plutôt à la fatigue. Parfait, il semble si guilleret que tu t'en voudrais de lui sapper le moral. D'ailleurs, il semble différent de l'accoutumé, comme s'il se force à agir autrement.

"Oui, très grosse journée. Pfiou !"

Tu le questionnes bien vite. Peut-être passe-t-il te voir pour t'annoncer qu'il sort avec une fille. Tu espères qu'elle est gentille et qu'elle ne profitera pas abusivement de lui. Il est si adorable, il ne mérite pas d'être traité ainsi. Ah ! Il n'en est pas sûr, il s'apprête donc à rejoindre la jeune fille qui fait battre son coeur pour lui déclarer sa flamme ? Tu n'oses pas trop t'approcher de lui, tu es toute dégoulinante et sale, et tu ne voudrais pas tacher ses beaux vêtements. Il te tend un paquet cadeau que tu saisis de tes mains froides et humides, levant un regard abasourdi vers lui.

"Pour moi ?"

Ton coeur dégringole. La fameuse fille qui lui plaît, c'est donc toi ? Tu te sens soudainement mal, tu pâlis à cette annonce. Il agrémente ce présent d'une magnifique rose rouge fraîchement née de son pouvoir. Et cette fois, tes joues se teintent. Ton cerveau semble fonctionner au ralenti alors que te voilà affublée d'un paquet et d'une rose dans un couloir. Malgré toi, tu humes le parfum de la jolie fleur.

"Elle est très belle, merci Castiel. Tu veux bien ... qu'on rentre ?" Tu gardes la rose dans l'une de tes mains et te sens bien vite débordée. Tu lèves tes iris d'améthyste vers lui. "Ca t'ennuie de tenir le paquet pendant que j'ouvre la porte ? J'ai peur de l'abîmer avec mes vêtements mouillés."

Non, tu ne peux pas te résoudre à lui faire du mal dans un couloir. Tu préfères discuter avec lui à l'intérieur, au calme. Une boule se forme dans ta gorge alors tu farfouilles nerveusement dans ton sac lui aussi détrempée pour sortir tes clés. Tu les fais tomber au sol, poussant un juron. Ce n'est pas ton jours Kaede. Deux amis blessés physiquement et voilà que tu vas sans doute briser tous les espoirs du troisième. Tu t'abaisses pour les ramasser et parviens enfin à déverrouiller ta porte. Tu lui souris.

"Vas-y, entre, fais comme chez toi."

"Oui c'est pour toi, j'espère que ça va te plaire."

Tu pouvais sentir ton cœur s'emballer au fur et à mesure que les secondes s'écoulaient. Pourquoi ne te répondait-elle pas ? Tu allais te prendre un râteau bien évidemment. Il ne pouvait pas en être autrement avec quelqu'un comme toi. Tu n'étais qu'une bête et elle la belle. Ton cœur te faisait mal mais ce n'était pas cette douleur habituelle c'était autre chose. C'était donc ce que ta sœur avait pu ressentir ? Argh cet Abel ne perdait rien pour attendre ! Tu voyais bien son teint changer subitement... à ses yeux tu devais très certainement redevenir le gamin bête et idiot que tu étais autrefois. 

Par politesse sans doute elle renifle ta jolie rose avant de te demander si tu voulais bien tenir ton propre cadeau. Bien sûr elle était piégée et ne pouvait pas prendre la fuite alors que tu étais devant son propre appartement. Quel idiot tu avais tout foiré, encore une fois ! Tu sursautas même en l'entendant pousser un juron quand elle fit tomber ses clefs. Tu déglutis... la douleur revenait. Sans te montrer tu essaies de te calmer, de respirer de ton mieux avant de lui dire : "Stresses pas... tu n'a pas besoin de te mettre dans tout tes états." Tu souriais, un sourire de façade simplement pour qu'elle ne se sente pas trop mal. Implicitement tu lui faisais comprendre que tu connaissais déjà sa réponse. Pourtant c'est une véritable tempête dans ton crâne en ce moment était-elle sincère ces fois où elle avait loué tes qualités ou était-ce parce qu'elle voulait se donner bonne conscience ? 

A sa demande tu entrais dans l'appartement que tu avais déjà visité une fois. Un super moment passé en compagnie de ton amie. Tu poses le paquet sur la table de son salon attendant patiemment que la jeune femme te donne clairement une réponse bien que tu ne faisais pas d'idée sur la dite réponse. Putain qu'est-ce que ça faisait mal....

Tu te sens vraiment nulle. D'une nullité absolue. Tu t'apprêtes à briser le coeur si pur de cet ami si important à tes yeux. Tu détestes la vie, parfois, surtout dans ces moments-là. Tu déglutis, consciente que son sourire n'est plus aussi rayonnant que lorsque tu étais arrivée ce soir. Mais tu as conscience également qu'accepter pour ne pas le blesser lui ferait encore plus de mal à long terme. Les sentiments sont douloureux, complexes. Et bien que tu n'ais jamais connu l'amour, tu oses imaginer le mal qui va l'envahir. A moins que ce ne soit qu'une passade, juste un béguin. Tu l'espères.

Tu ne prends même pas la peine de te sécher ou quoique ce soit d'autre, tu te diriges immédiatement vers la cuisine afin d'attraper un grand verre propre que tu remplis d'eau afin d'y déposer la précieuse rose. Tu reviens vers le salon, la déposant au milieu de la petite table. Tu ferais en sorte de la conserver le plus longtemps possible. Tu attrapes la main de ton ami, avec douceur, et l'incite à s'asseoir sur le canapé. Tu en fais de même sans lâcher sa main. Tu cherches tes mots, tu ne sais pas si tu dois ouvrir ou non ce cadeau. Pour toi, il est important de mettre les choses au point. Tu décides de lever les yeux vers lui, hors de question d'être lâche et de minauder sans le regarder.

"Castiel ... Je ... Je suis désolée. Je ne savais pas que tu ressentais ce genre de sentiments pour moi. Ca me touche énormément, vraiment. Tout ce que je t'ai dit, je le pense, j'apprécie ta compagnie. J'aime te taquiner, tant tu es mignon quand tu rougis. J'aime te voir sourire. J'aime réellement t'avoir comme ami. Tu comptes beaucoup pour moi, mais ... pas de cette manière-là ... S'il te plait ... Me déteste pas."

Tu sursautes alors qu'un petit nuage blanc saute sur les genoux du jeune blanc. Kyo s'est éveillé et n'hésite pas à faire fête à ton invité. Tu souris légèrement, bien que le coeur n'y est pas vraiment. Puis tu reprends, gardant sa main au creux de la tienne.

"Et, ce n'est pas ce que tu m'as dit qui m'a rendue si nerveuse. J'ai juste passé une très mauvaise journée. Et te voir devant ma porte m'a mis du baume au coeur." Tu hésites. "Tu voudrais quand même passer la soirée avec moi ? Je peux commander un repas chinois ou une pizza !"

La douleur était forte, incomparable à tous ces sévices que tu avais déjà du endurer par le passé et pourtant tu semblais faire front, ne pas courber l'échine comme lorsque tu étais dans cette cave. Comble de l'ironie... actuellement tu aurais tellement préféré être dans cette cave en notre compagnie. Tu la regardes revenir avec ce verre qui contenait ta création magique. Tu ne lui avais pas dit qu'il n'était pas nécessaire de l'entretenir, qu'elle allait subsister ? Un oubli sans doute. Toi aussi tu ne te sentais pas très bien ce soir, tu aurais mieux fait de te casser une jambe au lieu de venir dans cet endroit. Lorsqu'elle t'attrape la main tu eus même un mouvement de recul avant de t’asseoir à ses cotés. Tu savais ce qu'elle allait dire mais par politesse tu préférais garder le silence et l'écouter. 

Effectivement ton amie te sortait les banalités du genre "tu es quelqu'un de bien mais", "ce n'est pas toi mais", "je t'aime mais pas comme ça". Chacune de ses phrases faisaient plus mal que les pires sévices que nous t'avons infligé durant ton enfance. Tu arrivais même à espérer que ta grande soeur ne face irruption dans ce salon pour te sauver et te ramener à la maison. Et pour finir elle te demande de ne pas la détester... comme si tu étais capable d'une telle chose. Tu étais un idiot fini de te bercer d'illusion tu te rappelles. Tu secouais alors la tête comme pour la rassurer. "Bien sûr que non. Tu me crois capable de te détester ? On-on est ami non ?" Ton discours sonnait faux enfin ton sourire surtout car avant ton propre bien être tu ne voulais pas que ton amie ne se sente mal par ta faute. 

Tu sursautais ensuite exactement en même temps que Kaede alors que l'intru n'était autre que le petit Kyo. Souriant enfin essayant de sourire tu posais ta tête sur l'animal qui te léchait le visage comme s'il s'agissait là de la dernière fois que tu le voyais. C'était peut être le cas après tout.... La Rose finissait par te demander si tu étais d'accord pour passer la soirée avec elle. Ton cœur te disait oui mais la raison t'indiquait clairement le contraire. Lentement tu retirai ta main. 

"On sait tous les deux qu'il ne vaut mieux pas non ?" Ton sourire était cette fois sincère, touchant alors que tu te levais avec le familier dans tes bras. "Désolé, on dirait bien que j'ai gâché ta soirée... pardon vraiment." Tu déposais alors le chien dans les bras de sa maîtresse évitant le moindre contact physique avec elle afin de ne pas paraître trop insistant. En réalité tu venais de te faire "friendzoner" bien comme il faut, c'était Jojo93 qui avait raison sur toute la ligne. 

"Passes une bonne soirée quand même Kaede et j'espère que tu auras des journées moins difficiles." Tu partais en direction de la porte d'entrée avant de te stopper déclarant sans même la regarder. "Tu me diras ce que tu penses du cadeau ? Enfin si tu veux encore... non laisses tomber." Tu baissais alors la tête passant la porte d'entrée pour la refermer calmement derrière toi. Les contes de fée n'étaient visiblement par pour toi, toi la bête....

Tu l’as blessé. Tu le sais. Tu le vois à son sourire qui semble si faux. Tu te rends compte à quel point tu peux l’aimer quand il sourit sincèrement. Tu t’es beaucoup attachée à ce garçon et tu as l’impression d’être un monstre en le rejetant de la sorte. Bravo, Kaede, tout faux aujourd’hui. Tu ne parviens pas à donner le change, ton regard est triste, coupable. Tu déglutis, baissant les yeux.

« O-oui. On est ami … »

Pourtant, tu as cette impression que votre lien s’est subitement brisé. Par ta faute, tu le sais. Pourquoi faut-il que cette journée tourne ainsi, alors qu’elle avait si bien commencé ? Oui, Aaron t’a proposé un poste de titulaire de manière définitive au sein de la 5ème division. Mais tout ceci te semble si loin. Tu devrais être euphorique, mais les évènements qui ont suivi te refroidissent. Tu as l’impression qu’aucune chaleur ne peut pénétrer ton cœur à cet instant. Il y a bien longtemps que tu ne t’étais pas senti aussi mal. C’est comme si tu restais bloquée dans un cauchemar.

Tu tentes vainement de te rattraper, espérant pouvoir faire perdurer votre amitié malgré tout. Il retire sa main de la sienne. A ce moment, c’est comme si on t’arrachait une partie de toi. Pourtant, ce n’est pas à toi d’en souffrir. Imagine ce que lui peut ressentir. Tu ne sais pas ce que c’est d’être rejeté par quelqu’un que l’on aime. Tu ne peux pas lui demander de faire semblant, d’oublier ses sentiments. Tu ne peux t’empêcher de culpabiliser. Peut-être lui as-tu envoyé des signaux ambigus que tu pensais naturels ?

« Non, tu n’as rien gâché du tout, je t’assure … » Tu attrapes ton familier qu’il te tend. « T-tu pars déjà ? »

Tu déglutis, tu ne parviens pas à chasser cette boule logée dans ta gorge. Des doigts glissent sur le pelage de ton chiot alors que tu te lèves pour suivre le jeune blanc. Tu l’observes silencieusement, consciente que tu n’as pas le droit de le retenir. Ce n’est pas à lui de te consoler suite à ce que tu lui as fait. Tu aurais tout de même aimé lui dire à quel point il est élégant, mais tu t’abstiens. A quoi bon, cela ne pourrait que lui faire plus de mal. Il se stoppe, tu espères l’ombre d’un instant qu’il se retourne pour te parler, te sourire, n’importe quoi. Tu aurais peut-être même préféré qu’il te hurle sa peine plutôt que de feindre le bien-être. Le cadeau … Celui que tu n’as pas ouvert. Tu aurais peut-être dû le faire en sa présence ?

Aucun mot ne sort de ta gorge. Il quitte ton appartement, sans même un regard, refermant délicatement la porte. Tu ressens un vide, cette sensation d’avoir perdu un être cher. Tu es persuadée que ce ne sera pas le seul à te tourner le dos pour les actes de la journée. Claire, aussi, pour laquelle tu n’as pas daigné surmonter tes angoisses pour aller la voir. Comme rarement, des larmes perlent au coin de tes yeux alors que tu serres Kyo contre toi. Il ressent ta peine et tente de te réconforter au mieux. Sans broncher, tu te mets à sangloter, comme une enfant s’accrochant à sa peluche favorite. Tu finis par revenir sur tes pas pour revenir vers ton canapé, laissant échapper tes pleurs sans aucune retenue. Après tout, tu es seule, tu n’as rien à cacher à personne à cet instant. Mais tu t’en veux tellement, tu te sens tellement lâche. Tu te sens idiote, même, puisque tu es celle qui a provoqué tout ceci.